La party communiste !22/12/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/12/une-1693.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

La party communiste !

Voici comment l'Humanité présente la «party», que le PCF a consacrée à la commémoration du 80e anniversaire de la fondation du Parti Communiste.

(Article paru dans l'Humanité du 18 décembre 2000)

De nos envoyés spatiaux

Ce n'était ni le Grand Soir, ni le Grand Métinge du métropolitain, mais «ils» sont venus : deux mille cocos-technos place du «Colonel va bien», comme l'a renommée une main anonyme sur le grand drap de libre expression tendu par Artpax. Sont-ils venus pour une teuf d'enfer dont l'annonce avait circulé par tous les câbles et réseaux ? Ou pour redonner la pêche à un parti qui fête quand même ses quatre-vingts ans, ma bonne dame ? Souvent les deux, mon colonel. Et comment savoir quand on est deux mille à s'envoyer en l'air sous les coups de boutoir platinesques de DJ Proze et plus tard de DJ Steiner, faisant résonner d'envolées psychédéliques des murs bien plus habitués aux discours politiques et autres comptes rendus de réunion ? «Mais qu'est-ce qui se passe ici le reste du temps ?», demande Antoine, quinze ans, sidéré sous la douceur bleutée de la coupole qu'a dessinée Oscar Niemeyer. Celle-là même que le carton de la soirée montre inondée de lumière blanche sous les projecteurs d'une soucoupe volante frappée d'une étoile rouge. Des extraterrestres, les cocos ? Plutôt des terrestres extras qui se désapent progressivement, manteau, pull, T-shirt, histoire de cirer comme jamais un dance-floor chauffé à blanc. Ou plutôt rouge vif !

La musique pulse, rythmique techno et impro sur du AC/DC ou du Nirvana pour les teufeurs en goguette, clope au bec, sourire aux lèvres. Deux niveaux pour décoller. Sans compter les bars, pris d'assaut par ces night-clubers. Les caméras de «Télé Bocal» ne perdent pas une miette de cette teuf très fin de siècle : «C'est l'endroit le plus branché de Paris ! Pourquoi n'y ont-ils pas pensé avant ?», s'exclament-ils, en sueur, nettoyant l'objectif embué.

Les couples se forment, les murs se déforment. D'autres profitent de la moquette pour rêver des matelas qui chantent : va-t-on assister à un véritable «coco-boom» et à la recrudescence de «Robert» au top-ten des prénoms à la mode ? Rendez-vous dans neuf mois.

Eh ouais, coco ! Foin des images d'Epinal ! Le PCF, ce n'est pas que les choeurs de l'Armée rouge, dont on pouvait saisir quelques bribes sous la Coupole, projection de films d'actualité et du meilleur d'Eisenstein. Plaisir des yeux et des oreilles sous cette cathédrale de béton organique, contre lequel les plus fatigués soufflaient quelques instants, s'affalant telle une voile, vite regonflée par les images de la Révolution des oeillets balancées par Jojo, qui, dans le civil, fait «aussi photographe pour mariages robeu». Pogo, solo, schizo, nympho. Certains ados regardent leurs parents montés sur ressort et lâchent, éberlués : «Sont masos !» Tout le monde n'a pas eu la chance d'avoir des parents communistes. Une fois lâchés, impossible de les arrêter, même quand le bar tire la langue et que l'électricité se la joue courant alternatif. Mais comme dirait l'autre : «Un Marx et ça repart !»

Retrouvailles sans rigueur entre camarades qui se contentaient jusque-là de l'étreinte annuelle à la Fête de l'Huma. Mais aussi oeillades, ronds de jambe et clins d'oeil appuyés dans la pénombre de ce night-club. Ça drague à tout va. En option, le classique «Alors, t'es coco, cocotte ?» Coup de foudre ou illusion des stroboscopes ?

Après avoir perdu plusieurs litres d'eau, la tête pleine de rêves et de décibels, des artistes en herbe, poètes «Pouet ! Pouet !», jouent de la bombinette et du marqueur, parce qu'on est au «pays d'Agadaragon». Des p'tits cocomiques : «Cool ! Une party communiste !» La famille Marx au grand complet, de Groucho à Zeppo. Sans compter les régionaux de l'étape : les terribles «Marseillais» !

Cinq heures du mat' : le Colonel vous salue bien et les couples et les groupes déambulent à la recherche d'une dernière clope, d'une soupe à l'oignon, d'un taxi introuvable ou d'un métro enroué. Chill-out dans l'aube glacée, eskimos en fausse fourrure. Ou descente endiablée pour les plus allumés. Et nous, malgré nos têtes, on doit encore mâcher du papier. Engagez-vous, qu'y disaient ! La prochaine fois, l'after, on aimerait autant qu'ça s'passe à l'Huma.

(Dominique Widemann et Sébastien Homer)

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