Hôpital Saint-Jean-de-Dieu Lyon : Dégradation des conditions de travail et licenciements15/12/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/12/une-1692.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Hôpital Saint-Jean-de-Dieu Lyon : Dégradation des conditions de travail et licenciements

La direction de l'hôpital Saint-Jean-de-Dieu vient de licencier pour faute lourde deux agents hospitaliers de nuit, tous les deux infirmiers depuis de très nombreuses années dans l'établissement. Elle leur reproche d'avoir laissé un malade difficile sans soins la nuit (ce qui est totalement faux) et de ne pas avoir assuré le nettoyage complet de la chambre dans laquelle il se trouvait. Cette décision inadmissible est l'aboutissement d'une année où les sanctions disciplinaires n'ont pas manqué : pas moins de 27 procédures disciplinaires depuis janvier pour des motifs futiles, avec mises à pied et avertissements.

Il est vrai que les conditions de travail dans ce centre hospitalier spécialisé (CHS) - hôpital psychiatrique privé à mission publique - se sont dégradées depuis des années (manque chronique de personnel, fermetures de lits), et plus particulièrement depuis l'application des 35 heures en octobre dernier. L'accord a été appliqué sans réels moyens supplémentaires. Seulement dix embauches ont été programmées alors que, avant même la mise en place de cet accord, plus d'une centaine auraient été nécessaires pour accueillir et s'occuper réellement des malades difficiles qui sont admis dans cet établissement.

Le déficit en personnel s'est donc alourdi, en particulier la nuit où les absences ne sont plus remplacées entièrement (seuls des intérimaires sont appelés mais seulement une partie de la nuit). C'est ainsi qu'une infirmière s'est retrouvée seule entre 4 heures et 6 heures du matin en présence de trois malades dangereux! Il est désormais courant que trois infirmiers (au lieu de quatre) soient présents sur deux services. Les fermetures de lits décidées par le ministère depuis des années ne permettent pas d'assurer dans de bonnes conditions, l'accueil des patients en état de crise, ce qui oblige souvent à les maintenir attachés faute de chambre d'isolement. D'où une dégradation de la qualité d'écoute que nécessitent ces malades, et par conséquent une plus grande agressivité de leur part. Les accidents du travail par agression se sont multipliés (pratiquement un accident sur deux concerne une agression). Même les repos du week-end ne sont plus assurés, la direction pouvant imposer à un agent de revenir s'il y a des absents.

C'est dans ce contexte de mécontentement général où plusieurs actions ont été menées depuis juin pour obtenir des remplacements en nombre suffisant, où des médecins eux-mêmes ont reconnu la dégradation de l'accueil et de la sécurité tant des malades que des personnels que la direction a voulu frapper fort.

La disproportion entre la prétendue faute de ces deux agents qui, comme beaucoup, parent au plus pressé dans l'urgence (c'est-à-dire assurer les soins) et la décision de licenciement pour faute lourde a choqué beaucoup d'agents. Même s'ils n'ont pu faire revenir la direction sur sa décision inique, ils ont tenu à manifester leur soutien à leurs deux camarades en débrayant et en manifestant à 150 dans l'établissement le jour de leur départ, et cela malgré une mobilisation de la direction et de l'encadrement déclarant la grève illégale.

La politique de restrictions budgétaires menée dans la santé depuis des années par les gouvernements successifs aboutit à cette situation insupportable où les malades ne peuvent être accueillis et soignés dans des conditions dignes, où les personnels subissent une dégradation continuelle et dangereuse de leurs conditions de travail, et où une direction autoritaire entend appliquer cette politique en maniant le fouet et le bâton, à tel point que nombreux sont ceux qui préfèrent partir plutôt que de travailler dans une telle ambiance.

Une pétition circule actuellement pour réclamer la réintégration des deux licenciés, mais c'est à un mouvement d'ensemble que les hospitaliers doivent se préparer afin d'obtenir les effectifs supplémentaires indispensables pour encadrer suffisamment les malades tout en garantissant la sécurité du personnel.

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