- Accueil
- Lutte ouvrière n°1690
- Vache folle : La loi du silence protège les responsables
Leur société
Vache folle : La loi du silence protège les responsables
Deux familles de victimes de la maladie de Creutzfeld-Jakob ont décidé de porter plainte contre X. « Mon fils n'a rien fait d'autre que manger, et il va mourir », a déclaré la mère d'un jeune qui vient d'apprendre sa contamination et sa condamnation.
On comprend la colère des proches des victimes qui tentent par ce biais de trouver les responsables ou les coupables de la mort de leur parent. Car l'épidémie de la vache folle et le développement de la forme humaine de cette maladie ont des responsables et même une chaîne de responsables.
Tous les scientifiques sont d'accord pour désigner les « farines animales » comme vecteur de la maladie. A l'origine, pour des raisons de rentabilité, on a fait avaler à des herbivores les produits issus des carcasses d'autres animaux. Certains de ces animaux étaient sains et destinés à la boucherie, mais on a aussi permis d'utiliser ainsi le produit de l'équarrissage, c'est-à-dire de valoriser les cadavres, pouvant être porteurs d'infections, en les réintroduisant dans la chaîne alimentaire. Et ce qu'on appelle de façon pour le moins tendancieuse « farines » comprend des déchets animaux totalement impropres à la consommation. Encore récemment, le Canard Enchaîné révélait la réinsertion, dans la fabrication de certaines farines animales, de boues, y compris de matières fécales, issues de stations d'épuration françaises.
Et puis, toujours pour le sordide objectif de faire plus d'argent, au moins en Grande- Bretagne, la température de chauffage de la fabrication de ces farines a été baissée, alors que la destruction du prion, agent de la maladie de la vache folle, nécessite que l'on atteigne une température de plus de 130 °C au moins pendant une certaine durée.
Dès 1990, on découvrait que la maladie de la vache folle pouvait franchir la barrière des espèces, se transmettre au chat, puis à l'homme. La France interdit alors l'utilisation des farines animales, mais uniquement pour l'alimentation des bovins. Les farines animales d'origine britannique furent frappées d'embargo. Pour autant, en France, le nombre de cas de vaches folles, loin de diminuer, augmenta. D'après la direction générale des douanes, si l'importation des stocks à bon marché de farines animales d'origine britannique a chuté à partir de 1991, les farines importées de Belgique sont passées de 4 776 tonnes en 1991 à 16 094 en 1994, et 18 292 en 1995.
José Bové, au nom de la Confédération paysanne, a porté plainte dès 1996 contre ces fraudeurs. Il a fourni à la justice un document indiquant la liste des 132 entreprises importatrices de ces farines. Il indique que « les 132 entreprises ne sont évidemment pas toutes incriminées. Cependant, dans la liste on retrouve les noms de Glon-Sanders, Guyomarc'h, l'Union des coopératives bretonnes, tous ceux qui sont aujourd'hui impliqués dans des affaires d'ESB dans les troupeaux de l'ouest de la France. »
Mais cela n'a pas l'air d'intéresser la justice et le gouvernement puisque, depuis 4 ans, il n'y a eu aucune suite judiciaire à cette plainte.
La loi du silence protège les capitalistes de ces secteurs. Les vétérinaires y sont tenus. Face à toute découverte d'empoisonnement ou maladie, ils n'ont pas le droit d'en faire état publiquement. Les codes de la profession les obligent à ne communiquer ces informations qu'à leur supérieur hiérarchique et, au plus haut, au préfet. C'est ainsi que bien des scandales alimentaires ont pu être étouffés.
Quant aux salariés de ces groupes agro-alimentaires qui s'aviseraient de dénoncer des conditions de fabrication dangereuses pour les consommateurs, ils sont, comme tout autre salarié, sous la menace de licenciement. Ils seraient pourtant les mieux placés pour les constater, sans avoir besoin de commission d'enquête.
C'est la loi du profit qui a engendré la maladie de la vache folle et ses possibles conséquences sur l'homme. Mais aujourd'hui, les responsables sont toujours couverts.