Europe - Parlement européen : La privatisation des services postaux17/11/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/11/une-1688.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Europe - Parlement européen : La privatisation des services postaux

Reprenant la politique des gouvernements nationaux, la Commission européenne émet, depuis plusieurs années, des directives liquidant petit à petit le service public postal pour le livrer au secteur privé. Le Parlement européen est convié à apporter sa "caution démocratique" à cette attaque contre le service public.

Depuis une directive de 1997, le service postal est ouvert aux prestataires privés pour des envois dont le poids dépasse 350 g et le prix 5 fois le tarif de base. La prochaine étape consiste à abaisser ce "seuil poids-prix" - pour reprendre le jargon officiel - à 50 g et 2,5 fois le tarif de base.

La question doit venir en discussion en assemblée plénière au mois de décembre prochain pour La Poste. Mais ce qui vient de se passer dans les commissions qui préparent ce vote augure mal de l'attitude de ceux qui, pourtant, se prétendent les défenseurs du service public.

En effet, cinq commissions devaient se prononcer sur la question, notamment la commission économique dont fait partie notre camarade, députée de Lutte Ouvrière, Armonie Bordes. Un député de droite, le libéral suédois Olle Schmidt, était le rapporteur d'un texte qui soutenait le projet de la Commission européenne. Face au texte soutenu par ce député de droite, une série de soixante amendements a été proposée, dont beaucoup des socialistes. Ces amendements se plaçaient entièrement sur le terrain de la politique dite de "libéralisation", la plupart n'étant destinés qu'à assortir la brutalité des formulations de la Commission de quelques considérations qui en adoucissaient le ton sans en modifier le fond.

C'est ainsi, par exemple, qu'à la place d'un des considérants du texte parlant de "la prise de décision concernant la poursuite du processus d'ouverture du marché à la concurrence dans le but de créer un marché unique des services postaux", l'amendement socialiste proposait l'expression : "la prise de décision concernant la poursuite du processus d'ouverture progressive et contrôlée du marché à la concurrence dans le but de créer un marché unique des services postaux" !

Comme pour illustrer l'idée de la progressivité, l'amendement de la députée socialiste Bérès proposait, au lieu du seuil de 50 g, un seuil d'abord de 200 g. Sous la pression apparemment des autres membres de la délégation socialiste, elle a dû rabaisser ce seuil à 150 g et trois fois le tarif de base, Notre camarade Armonie Bordes est intervenue pour dénoncer le fait qu' "on ne nous donne le choix qu'entre une libéralisation brutale et immédiate, avec toutes les conséquences que cela implique pour la population, une Poste à deux vitesses, etc., et pour les travailleurs, des suppressions d'emplois, et une libéralisation plus étalée dans le temps, mais une libéralisation quand même. Or, moi, je me prononce contre la libéralisation, qu'elle soit lente ou rapide, car je suis pour le service public." La question de La Poste étant discutée également dans la commission emploi et affaires sociales, notre camarade Chantal Cauquil a voté contre pour les mêmes raisons.

Mais il se trouve qu'à la commission économique, le jeu des présences et des absences a fait que les partisans de la libéralisation "option 150 g" et ceux "option 50 g" étaient en nombre égal au moment du vote. D'autant que le représentant du parti de Pasqua et une autre députée de droite ont voté avec les premiers. Pour avoir la majorité, il leur aura manqué le vote de notre camarade, qui ne voulait pas plus cautionner la libéralisation à doses progressives que la libéralisation brutale.

Notre camarade a donc évidemment voté contre l'ensemble du rapport lors du vote final. Comme leurs principaux amendements ne sont pas passés, les députés PS et Verts se sont tout de même résolus à voter contre l'ensemble du rapport qui, du coup, s'est trouvé rejeté. Ainsi, aucune des deux variantes favorables à la libéralisation n'a eu la majorité des voix et la commission économique s'est séparée sans définir une position.

Mais il faut croire que ce qui tenait le plus au coeur des députés socialistes, flanqués des Verts, présents dans le débat, c'est que puisse s'affirmer leur vision de la déréglementation (comme cela aura été le cas à la commission emploi et affaires sociales où les amendements du PS ont eu la majorité).

Ils ont eu, en plus, le culot d'apostropher notre camarade en l'accusant de prendre parti pour la droite, du simple fait qu'elle a refusé le projet de dérégulation et de privatisation sauce socialiste, qui se distingue d'autant moins du projet de la droite que le seuil poids-prix de 150 g ne doit être qu'une étape. Les députés Verts ont joué leur propre partition dans ces attaques en étant plus hargneux encore que leurs compères socialistes. Pour ces gens-là qui marchent allègrement sur leurs propres discours et leurs promesses électorales de "défendre les services publics", il est inacceptable que notre députée soit fidèle à ses engagements. Il est vrai qu'il y a une certaine logique dans leur attitude : en France, c'est bien le gouvernement de la Gauche plurielle qui démantèle les services publics, qui en livre des pans entiers au privé.

Mais qu'ils ne nous disent pas, pour justifier la politique du gouvernement, que c'est la "faute à Bruxelles" ! Car il faut le reconnaitre : les députés socialistes sont aussi bien au service du grand capital et de ses exigences au niveau européen qu'au niveau national.

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