35 heures : Fabius s'apitoie sur les PME mais n'oublie pas le grand patronat10/11/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/11/une-1687.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

35 heures : Fabius s'apitoie sur les PME mais n'oublie pas le grand patronat

Dans une interview au quotidien Le Parisien à propos de l'application des 35 heures aux entreprises de 20 salariés ou moins, prévue à partir du 1er janvier 2002, Fabius a réaffirmé sa compréhension à l'égard des petits patrons, déclarant : " Des lois ont été votées, on ne les annulera pas, mais, nous devons certainement traiter les situations diverses avec souplesse ". A plusieurs reprises, il avait déjà laissé entendre qu'il faudrait assouplir la loi Aubry sur la réduction du temps de travail pour les petites et moyennes entreprises (PME) qui connaissent des difficultés d'embauche.

Fabius fait preuve d'une remarquable souplesse. Car quand des patrons se plaignent de ne pas trouver à recruter des salariés à leur convenance, cela traduit surtout leur volonté de ne pas embaucher autrement qu'avec de bas salaires et dans des conditions précaires.

Les lois Aubry, on l'a vu et revu, ont, sous le couvert d'une diminution du temps de travail à 35 heures, apporté sur un plateau à l'ensemble du patronat une plus grande flexibilité des horaires, l'annualisation du temps de travail, avec en prime une limitation, voire un blocage des salaires, le tout abondamment arrosé de subventions destinées aux patrons.

Cerise sur le gâteau, la deuxième loi Aubry, votée en janvier dernier, ouvre la possibilité de dérogations à des entreprises de toutes tailles, en prévoyant qu'" une durée équivalente à la durée légale peut être instituée dans les professions et pour des emplois déterminés comportant des périodes d'inaction ". En clair, cela signifie que les horaires pourront dépasser largement les 35 heures. Déjà, un décret concernant les routiers paru fin janvier prévoit une " durée de service " de 37 heures (ou 160 heures par mois) et même de 39 heures (ou 169 heures par mois) pour ceux qui effectuent de longues distances. Il ne s'agit là que de la durée légale du travail pour le calcul des heures supplémentaires, ou éventuellement du nombre de repos compensateurs. Quant à la durée maximale du travail, elle est bien supérieure à celle fixée par la loi, fixée pourtant à 44 heures par semaine ou 1 600 heures dans l'année.

Si, dans certains cas, cela peut aboutir pour les routiers à une amélioration par rapport à la situation antérieure, l'injustice n'est pas supprimée, et les conséquences sociales catastrophiques d'une durée de conduite excessive des routiers demeurent. Pour les hôtels, les restaurants et les cafés, un système d'heures d'équivalence a permis jusqu'à présent au patronat d'affirmer que 43 heures de service égalent 39 heures de travail. Le gouvernement ne compte nullement mettre fin à ce genre de tour de passe-passe légal : un décret en préparation, prétendument sur les 35 heures, devrait se traduire par un horaire supérieur.

Comme pour les routiers, le gouvernement justifie sa politique par son soucis de la défense des petites entreprises. Mais, au-delà de certains cas, cela servira surtout à accroître les profits des grands sociétés, déjà largement bénéficiaires. Ainsi dans l'hôtellerie, c'est le groupe Accor (hôtels Ibis, Sofitel, Mercure, Novotel, Formule 1, des casinos), troisième à l'échelle mondial, qui mène la danse. Selon le journal Le Monde, il a réduit le temps de travail de 43 heures à 39 heures et, dans les négociations avec les syndicats, ne veut pas descendre en dessous. Et d'après le même journal, le gouvernement serait prêt à accepter que dans l'hôtellerie 39 égale 35. Même l'arithmétique élémentaire doit se plier aux exigences du grand patronat.

Partager