Après le secret d'Etat... le secret d'Etat20/10/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/10/une-1684.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Après le secret d'Etat... le secret d'Etat

Il est de mode, sur un sujet ou un autre, de voir le gouvernement afficher sa volonté de favoriser la "transparence". L'Etat n'aurait plus rien à cacher, laisse croire ce gouvernement à la différence de ses prédécesseurs. Deux affaires viennent de montrer qu'en la matière il y a loin des déclarations la main sur le coeur à la réalité.

D'abord, il y a eu l'affaire Elf. Il y a peu, Fabius, dont dépend la décision, annonçait la levée du "secret défense" sur les documents détenus par la direction des douanes et contenant la liste des pots-de-vin versés par Elf à l'étranger. Las ! Quand les juges ont reçu, enfin, ces documents, ils n'ont pas eu à passer beaucoup de temps à les étudier. Cela se composait en tout et pour tout de quelques feuillets. Une commission interne des services de douane était passée par là, et avait fait le tri. Ce qui restait se résumait à une peau de chagrin. "On ne va pas faire sauter la planète", a même déclaré l'un des membres de cette commission préposée au tri sélectif. La planète certainement pas, mais quelques bons copains de Fabius et du gouvernement, peut-être. Les juges se sont entendu dire que "les autres documents relèvent évidemment du secret", et en sont réduits à réitérer leur demande de la levée de celui-ci.

Même scénario, à peu de chose près, pour les recherches de l'historien Jean-Luc Einaudi sur la sanglante répression de la manifestation des Algériens, le 17 octobre 1961. Ce jour-là, la police parisienne dirigée par Maurice Papon avait tabassé sans retenue et assassiné les Algériens venus manifester pacifiquement à Paris, à l'appel du FLN, pour protester contre le couvre-feu instauré à leur encontre. Il y avait eu des centaines de morts.

En mai dernier, Jospin avait déclaré qu'il allait demander aux ministres concernés de déroger à la règle dont il découle que les archives concernant la guerre d'Algérie ne puissent être communiquées avant un délai de 60 ans. A croire, soit que Jospin se payait la tête du monde, soit qu'il n'a aucun pouvoir sur le préfet de police de Paris. Celui-ci vient de refuser une nouvelle fois à Jean-Luc Einaudi l'accès à ces archives. Là encore, il y a quelques personnages qui ont tout intérêt à ce que leurs faits et gestes restent dans l'ombre.

Quoi qu'ils puissent en dire, les gouvernements ne sont pas prêts d'abandonner la pratique du secret d'Etat. C'est si utile pour camoufler leurs agissements et ceux des puissants.

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