Les incidents d'Aubervilliers : Faire la guerre à misère... et pas entre miséreux !08/09/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/09/une-1678.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Les incidents d'Aubervilliers : Faire la guerre à misère... et pas entre miséreux !

A la suite de l'expulsion par la police de squatters qui s'étaient installés dans des logements sociaux de l'office municipal d'HLM de la ville d'Aubervilliers en Seine-Saint-Denis, une polémique publique dans la presse et à la télévision s'est développée. Le maire, Jack Ralite, a parlé de réseaux mafieux qui se feraient payer pour installer des familles ; les autres, comme l'association Droit au Logement (DAL), ont défendu après coup la situation de fait établie. Quoi qu'il en soit, au-delà des raisons invoquées et des justifications avancées par les uns et par les autres, il y a une situation qui dépasse largement le cadre de la ville d'Aubervilliers.

Tout d'abord, il est vrai que les mairies dirigées par le PCF, comme Aubervilliers, sont celles qui ont, depuis des dizaines d'années, construit le plus de logements sociaux et accueilli le plus de populations immigrées. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aurait pas des reproches à faire sur la façon de faire de ces municipalités, mais c'est une vérité. Comme il est incontestable que les villes les plus riches dirigées par la droite, voire le PS, ont tout fait pour s'opposer à la construction de logements sociaux.

L'Etat par l'intermédiaire des préfets renforce cette répartition sociale injuste et inégalitaire en plaçant d'autorité, et en priorité, comme la loi le leur permet, les populations les plus pauvres en attente de logements dans les logements sociaux de ces municipalités.

Mais quels que soient ceux qui ont organisés les squats en question, c'est bien la situation du logement en général et de ces quartiers populaires en particulier qui peut aboutir à de telles situations. Le constat, c'est que le logement social est le grand sinistré des vingt dernières années. Les crédits ont été diminués de façon dramatique, d'abord par la gauche quand elle est arrivée au pouvoir, puis par tous les autres gouvernements. C'est ce qui a rendu de plus en plus difficile la construction de logements sociaux ; sans parler même de logements sociaux de qualité, et qui ne soient pas à des prix de plus en plus prohibitifs.

Quant à la vie dans les quartiers populaires où ces cités existent, elle est devenue de plus en plus insupportable. D'abord le chômage de masse qui s'est installé a tout gangrené. La misère croissante a favorisé l'émergence de toute une économie parallèle, drogue, vols, etc., qui pourrit avant tout la vie des travailleurs qui y vivent. Et les restrictions budgétaires ont fait qu'il y a eu encore moins d'argent pour entretenir les cités, qui, en plus du reste, sont souvent laissées à l'abandon. Le tout entraîne un cycle infernal, où ceux qui en ont les moyens s'en vont de ces logements dès que possible. Ce qui ne fait que renforcer les problèmes.

Plus que l'attitude qu'ont pu prendre les représentants de la municipalité PCF sur les expulsions de squatters, ce qu'on peut leur reprocher est de se faire, au moins indirectement, les complices de la politique, c'est-à-dire de l'inaction et même de la défaillance de ce gouvernement qui, comme ses prédécesseurs, est responsable de cette situation, en consacrant l'argent public au service exclusif des privilégiés. Le PCF a rendu publique la réponse du gouvernement à l'interpellation qu'avait faite la députée communiste Muguette Jacquaint. Dans cette réponse, le gouvernement osait se féliciter de sa prétendue politique en matière de logement qui se résume à des effets d'annonce. Dans les faits, la municipalité PCF en est donc réduite à se faire le relais de ceux qui sont, avec le patronat, les responsables de la détresse qui s'est installée dans nombre de quartiers populaires. Et c'est sans doute cela le pire, car c'est ce qui contribue le plus à démoraliser les militants sincèrement attachés au sort de la population ouvrière.

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