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Espagne : Après les nouveaux attentats de l'ETA
L'assassinat par les commandos de l'ETA d'un conseiller municipal de Malaga, le sixième attentat mortel perpétré par cette organisation indépendantiste depuis la rupture de la trêve il y a six mois, est un nouveau crime qui n'a rien à voir avec la défense des intérêts des classes populaires qui vivent au Pays basque. Pas plus qu'il ne correspond aux nécessités d'une lutte menée par le peuple basque pour imposer son droit à choisir librement ses liens politiques avec l'Etat espagnol.
Il s'inscrit très étroitement dans le combat que mènent les dirigeants indépendantistes pour obtenir une part du pouvoir, voire la totalité du pouvoir dans un Pays basque qu'ils dirigeraient en fait au profit des possédants basques.
Depuis que l'ETA s'est constituée, cette organisation indépendantiste radicale, dont le recours aux méthodes terroristes est une constante, détermine ses objectifs et ses actions comme un appareil militaire agissant indépendamment des aspirations du peuple basque et des intérêts de tous ceux qui, au Pays basque et à plus forte raison dans le reste de l'Espagne, ont à souffrir des choix politiques, économiques et sociaux des dirigeants de l'Etat espagnol. La meilleure preuve en est que si l'ETA s'est développée en compétition avec le Parti Nationaliste Basque - le PNV, partisan d'un nationalisme dit modéré - elle ne combat pas la politique réactionnaire et anti-ouvrière de ses dirigeants, mais seulement leur modération vis-à-vis des forces politiques dites nationales parce qu'existant au niveau de l'ensemble de l'Etat espagnol. C'est ainsi qu'actuellement la coalition politique liée à l'ETA donne son appui parlementaire aux dirigeants du PNV au niveau du gouvernement basque. Sans cette alliance le PNV perdrait le gouvernement, à moins qu'il ne conclue un pacte avec le Parti Populaire ou le PSE (le PSOE du Pays basque). Mais ce serait là un choix risqué pour le PNV car un tel pacte risquerait de lui faire perdre une partie importante de son électorat
Au fil des décennies qui ont suivi la mort de Franco, les gouvernements centriste, puis socialiste, et aujourd'hui celui du Parti Populaire, se sont montrés incapables d'avancer dans le règlement du problème basque. La page du franquisme tournée, les dirigeants de l'Etat espagnol ont néanmoins continué d'opposer aux indépendantistes basques une politique répressive impitoyable en même temps qu'ils répondaient par une fin de non-recevoir à tout projet de règlement politique du problème basque admettant le droit à l'autodétermination de la population de la région.
Depuis la fin de la trêve de quatorze mois observée par l'ETA de 1998 à la fin 1999, cette organisation a repris une politique d'attentats visant à semer la peur parmi la classe politique et à démontrer qu'elle a les moyens de reprendre à tout moment une politique de terrorisme aveugle. Ce faisant, elle ne s'adresse pas seulement aux partis dits nationaux. Elle entend aussi contraindre le Parti Nationaliste Basque, le PNV, à renoncer à toute recherche d'une alliance avec ces partis en démontrant que non seulement celui-ci doit tenir compte de la force électorale des indépendantistes, mais aussi de leur capacité à rendre, par le recours au terrorisme, toute stabilité politique impossible à un gouvernement basque qui les marginaliserait.
Actuellement il semble que le gouvernement du Parti Populaire, qui depuis des mois s'est illustré dans une attitude intransigeante vis-à-vis des indépendantistes, qui a refusé d'ouvrir toute négociation politique au moment de la trêve, qui n'a même pas procédé au regroupement des prisonniers et qui fait la chasse aux militants de l'ETA, cherche par ailleurs à déstabiliser le gouvernement basque. Diverses propositions du Parti Populaire à l'adresse du PSOE tendent à jeter les bases d'une alliance entre le Parti Populaire basque et le Parti Socialiste du Pays basque (le PSE) pour conquérir le gouvernement basque en évinçant les nationalistes.
Et il est bien certain que ces grandes manoeuvres politiques, qui visent à casser l'alliance entre les nationalistes modérés et les indépendantistes de l'ETA, ne peuvent dans les mois à venir que contribuer à tendre la situation au Pays basque et à durcir le cours terroriste de l'ETA qui joue son va-tout politique.