Fabius, Jospin et la taxation de la spéculation : Quand la taxe Tobin sert à masquer les cadeaux au capital07/07/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/07/une-1669.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Fabius, Jospin et la taxation de la spéculation : Quand la taxe Tobin sert à masquer les cadeaux au capital

L'idée de la taxe Tobin, cet impôt sur les opérations de change proposé il y a près de trente ans par un économiste américain, afin prétendait-il d'empêcher la montée de la spéculation monétaire, est de plus en plus à la mode dans la classe politique.

Après Bayrou (qui s'en était déclaré partisan au Parlement Européen), Séguin (qui trouve que " ce n'est pas une idée sotte "), c'est aujourd'hui le tour de Jospin déclarant, lors d'une réunion de jeunes socialistes européens, " Je n'y suis pas hostile personnellement, ni même réticent ", suivi par les notables du Conseil Economique et Social qui viennent de proposer " la mise en place d'un mécanisme de ce type ".

Fabius lui-même, qui est le grand maître des impôts dans le gouvernement Jospin, a tenu à ne pas être en reste. Il est vrai que le même Fabius s'était déjà fait remarquer en signant un texte en faveur de la taxe Tobin lorsqu'il n'était encore que président de l'Assemblée nationale.

Pourquoi cet engouement soudain pour la taxe Tobin - c'est-à-dire pour un impôt qui vise, en principe, les spéculateurs - de la part de gens qui n'ont jamais raté une occasion de les favoriser ?

C'est que, ainsi que les uns et les autres se sont empressés de le faire remarquer, en l'état actuel des choses, c'est-à-dire dans un monde géré par ces politiciens, la mise en place d'une taxe Tobin nécessiterait rien de moins qu'une coopération étroite entre les Etats des pays riches. Il leur faudrait partager les informations sur les déplacements de capitaux, c'est-à-dire les opérations spéculatives de leurs capitalistes respectifs, et se mettre d'accord sur la façon d'en percevoir le montant et de le répartir ensuite. Et ceci alors que, par exemple, les gouvernements de l'Union Européenne, pourtant censés avoir déjà réalisé un certain degré d'intégration économique, en sont encore à se battre comme des chiffonniers à propos d'une levée partielle du secret bancaire destinée à lutter contre l'évasion fiscale en introduisant une taxation uniforme des profits boursiers à la source. Ils savent bien tout cela.

Et ils savent tout autant que, en tant qu'instrument de lutte contre la spéculation monétaire internationale, cette taxe Tobin n'est ni pour demain, ni même pour après-demain...

Mais c'est bien là tout son intérêt pour Fabius et Jospin, comme d'ailleurs pour les politiciens de droite candidats à leurs postes. Les discours sur la taxe Tobin ne leur permettent-ils pas de se payer le luxe d'afficher une prétendue volonté de s'en prendre aux profits exorbitants de la spéculation et par là même aux ravages que celle-ci a causés au cours de ces dernières années ? Moyennant quoi, ils peuvent éluder l'essentiel, c'est-à-dire toutes les mesures qu'ils seraient en situation de prendre dès aujourd'hui, par exemple en augmentant la taxation des grandes entreprises et des grosses fortunes, pour commencer. Ne sont-ils pas au gouvernement ?

Car il n'est nul besoin d'invoquer Tobin et sa taxe internationale pour imposer les profits d'entreprises géantes bien françaises comme Vivendi, ni pour en finir avec les multiples avantages fiscaux consentis en France par Fabius et ses prédécesseurs aux Finances, à des spéculateurs, rebaptisés " investisseurs " pour les besoins de la cause, ou aux dirigeants d'entreprises bénéficiaires des fameuses " stock-options ". Mais justement, c'est bien cela que les dirigeants socialistes veulent à tout prix éviter de faire. Alors ils parlent... d'autre chose !

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