Assurance-chômage : La provocation patronale23/06/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/06/une-1667.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Assurance-chômage : La provocation patronale

Le projet concernant l'assurance-chômage que l'organisation patronale Medef essaie d'imposer est ignoble, quel que soit le bout par lequel on le prenne.

Ignoble sur le fond, parce qu'en suspendant l'allocation chômage après refus de deux propositions et en la supprimant définitivement après un quatrième, il vise à obliger les chômeurs à accepter n'importe quel travail à n'importe quel prix. C'est un projet destiné à procurer au patronat une main-d'oeuvre forcée et bon marché, là où cela l'intéresse et au moment où cela l'intéresse.

Encouragés par la loi Aubry et par toutes ces mesures du gouvernement qui leur permettent d'être dégrevés des charges sociales sur les bas salaires, les patrons veulent qu'on leur fournisse toujours plus de main-d'oeuvre à bas prix. Ils savent que leurs profits, qui augmentent au bas mot de 20 % par an, viennent de ce qu'on ne cesse de pousser les salaires vers le bas.

C'est une agression contre l'ensemble des travailleurs, non seulement parce que chacun d'entre nous peut se retrouver au chômage demain, mais aussi parce que ces mesures, si elles sont appliquées, pèseront sur les salaires de tous.

Mais ce projet est aussi ignoble dans ses détails. Il supprime aussi un droit pour les travailleurs privés d'emploi pour le remplacer par un contrat individuel. Et le comble, c'est qu'on continuera à prélever sur la feuille de paye la cotisation assurance chômage. On prendra donc l'argent des salariés mais, pour avoir quelque chose en contrepartie, il faudra qu'ils en passent par les conditions du patronat.

Aujourd'hui déjà, 40 % seulement des chômeurs sont indemnisés par la caisse de l'assurance-chômage.

Mais le projet patronal aggrave et légalise une situation de fait inadmissible. Cerise sur le gâteau patronal : une baisse de 36 milliards de leur part de cotisation à l'Unedic.

L'ensemble du projet véhicule l'idée que se retrouver au chômage, c'est la faute aux chômeurs. Et ceux qui profèrent ces insanités sont les chefs de ces grandes entreprises dominant le Medef, qui sont les principales responsables du chômage et qui continuent à annoncer des plans de suppressions d'emploi, voire de licenciements.

Le plan du patronat représente une régression sociale grave. Et le fait que certains dirigeants syndicaux le signent montre seulement qu'ils sont infiniment plus les porte-parole du patronat auprès des travailleurs que les défenseurs, même incompétents ou impuissants, des travailleurs devant le patronat.

Lorsque les patrons de certaines branches se plaignent aujourd'hui de ne pas trouver la main-d'oeuvre dont ils ont besoin, cela signifie seulement qu'ils ne la trouvent pas encore aux prix aussi bas qu'ils le voudraient. Mais cela signifie surtout qu'ils ont l'intention de continuer, reprise économique ou pas, à dégrader nos conditions de vie, à nous imposer toujours plus de précarité, toujours plus de flexibilité et toujours plus d'intensité du travail, toutes choses qu'ils appellent la rentabilité.

Les patrons n'acceptent le " paritarisme " ou la " politique contractuelle " que pour autant que les organisations syndicales approuvent et cautionnent par leur signature la politique patronale.

Même lorsqu'il parle de " dialogue social ", le patronat ne cesse pas un instant de mener sa lutte de classe contre la classe ouvrière.

Alors, prêcher aux travailleurs le " dialogue social " à la place de la lutte de classe, c'est leur demander de se battre, les mains liées, contre un adversaire qui, lui, n'hésite pas à asséner des coups. Le seul salut pour les travailleurs, s'ils ne veulent pas que leur sort continue à se dégrader, même avec la croissance économique, est de répliquer aux patrons sur le même terrain, celui de la lutte : avec les armes qui sont les leurs, les grèves, les manifestations. Il faut une contre-offensive générale du monde du travail qui n'a que trop payé pendant la crise et à qui on demande de payer, alors que la bourgeoisie affirme elle-même que ses affaires sont florissantes. Le patronat se croit tout permis. Qu'il ne s'étonne pas du retour de bâton !

Arlette LAGUILLER

Editorial des bulletins d'entreprise du 19 juin 2000

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