Italie : L'échec des référendums - pour le droit de licencier, les patrons devront repasser26/05/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/05/une-1663.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : L'échec des référendums - pour le droit de licencier, les patrons devront repasser

Entre 31 et 32 % de votants en tout et pour tout : à cela s'est réduite la participation électorale aux référendums organisés en Italie le 21 mai et dont les résultats, le quorum de 50 % n'étant pas atteint, ne seront donc pas pris en compte. C'est un échec politique pour les " radicaux " Emma Bonino et Marco Pannella, qui en avaient été à l'initiative, mais aussi pour le gouvernement de centre-gauche de Giuliano Amato, qui en avait fait un enjeu.

La loi italienne permet à un groupe de citoyens, à condition de recueillir pour cela un certain nombre de signatures, de demander un référendum abrogatif d'une loi votée par le Parlement : il faut alors répondre par " oui " ou par " non " à l'abrogation. L'initiative radicale comportait plusieurs référendums, sept au total, sur des sujets allant du remboursement des frais électoraux à la carrière des magistrats, à la loi sur les licenciements et à l'abolition de l'élection à la proportionnelle encore en vigueur pour le quart des députés.

C'est ce dernier référendum qui comportait le principal enjeu politique. Après l'instauration du scrutin majoritaire il y a quelques années pour les trois quarts des députés, beaucoup souhaiteraient parvenir à un scrutin totalement majoritaire. Le gouvernement de centre-gauche, et notamment les DS (démocrates de gauche, l'ex-PC-italien) ne voudraient pas laisser la place sans avoir fait passer cette mesure. Il y a un an, un référendum sur cette question avait déjà échoué, faute de quorum. Qu'à cela ne tienne, le référendum proposé par les radicaux était l'occasion de remettre ça... sans plus de succès on le voit.

Il faut dire que la droite de Berlusconi, opposé à cette réforme pour ses raisons propres et ne souhaitant pas faire le moindre cadeau politique au centre-gauche, avait appelé à l'abstention sur l'ensemble des référendums. Mais à gauche, Rifondazione Comunista, la fraction du PC ayant gardé l'étiquette communiste, avait également appelé à l'abstention : la suppression de la fraction des députés élus à la proportionnelle serait évidemment un moyen de lui ôter toute autonomie politique, le scrutin majoritaire l'obligeant pour avoir des élus à passer accord avec les DS.

Et puis surtout, un autre référendum comportait un enjeu bien plus important du point de vue des travailleurs : le référendum sur le droit de licenciement.

Dans la foulée de la campagne ultra-libérale qui lui avait valu un succès aux élections européennes de l'an dernier, Emma Bonino et les radicaux proposaient en effet l'abolition de la loi obligeant un employeur à réintégrer un travailleur licencié en l'absence d'une " juste cause " reconnue par les tribunaux. C'était aller dans le sens des campagnes des patrons pour obtenir le droit de licencier comme ils veulent, mais aussi des déclarations gouvernementales allant dans le même sens au nom de la nécessaire " mobilité " et " flexibilité " du marché du travail et prétendant que pour aider à créer des emplois il faudrait d'abord que les patrons puissent licencier à leur guise.

Les syndicats et la gauche s'étaient divisés sur la réponse à donner, les premiers appelant à voter " non " et Rifondazione Comunista se ralliant finalement à l'abstention. Et en fait, appeler à voter " non " était aussi participer au référendum et risquer ainsi de donner une légitimité à l'abolition d'une loi imposée par les luttes des travailleurs, alors que la classe ouvrière ne reconnaît pas le droit, même à une majorité d'électeurs, de décider que des travailleurs peuvent être licenciés à la discrétion des patrons.

Heureusement, pour l'instant, par la conjonction de l'attitude de Berlusconi et surtout du désintérêt des électeurs, la voie libre aux licenciements n'a pas été donnée. Mais l'échec de ce référendum n'est nullement une garantie contre les attaques en projet contre la classe ouvrière. Des projets de loi libéralisant les licenciements sont en chantier et, si le patronat n'a pas obtenu ce qu'il voulait par ce biais, il cherchera à l'obtenir par d'autres, avec toute la complaisance voulue de la part du gouvernement de centre-gauche ou de celui de Berlusconi quand, comme c'est probable, celui-ci viendra à le remplacer.

Et contre ces projets, les seules garanties pour la classe ouvrière seront celles qu'elle réussira à imposer par sa place dans l'économie, par ses grèves, par toutes les manifestations de la force qu'elle peut représenter quand elle se mobilise pour la défense de ses intérêts de classe.

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