Limoux - Aude : Les grévistes de l'éducation nationale chez les Myrys07/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1656.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

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Limoux - Aude : Les grévistes de l'éducation nationale chez les Myrys

Le lycée polyvalent de Limoux (Aude) s'est mis en grève le 16 mars. La semaine suivante, le lycée a été pendant quelques jours le rendez-vous des instituteurs, des enseignants du collège, des agents, des parents d'élèves qui venaient s'informer et préparer des initiatives communes.

Au premier jour de la grève, une manifestation est partie du lycée jusqu'à l'entreprise Myrys où les ouvriers (en majorité des ouvrières) étaient en lutte contre des licenciements et occupaient les locaux depuis plus d'une dizaine de jours. Le cortège des lycéens et des enseignants grévistes, auquel s'étaient joints des parents d'élèves, a été reçu par des ouvrières et s'est rendu jusqu'au bureau du directeur.

Par une des deux portes sont entrés des lycéens et des enseignants, par l'autre, les ouvrières. Le directeur, au milieu de tout ce monde, n'en menait pas large et sous la banderole " Parents licenciés, enfants sacrifiés, ça ne peut plus durer ", il a dû lire le tract des grévistes revendiquant des créations de postes dans l'éducation. Comme il exprimait sa surprise devant des revendications qui ne semblaient pas le concerner, les grévistes lui ont dit qu'ils étaient venus lui présenter les enfants de ceux qu'il allait bientôt jeter à la porte. Pour garder une certaine contenance, le directeur a alors tenté d'expliquer que son rôle était de favoriser la réindustrialisation et l'installation de nouvelles entreprises dans la région. Une lycéenne l'a interrompu, lui demandant si c'est en licenciant les salariés qu'il allait favoriser l'emploi.

Comme il continuait son discours sur la situation économique et les perspectives de l'industrie de la chaussure, les grévistes l'ont hué et lui ont demandé combien il était payé. Les ouvrières, bien informées, ont alors crié " 187 000 F par mois, pour son sale boulot ! ". Une employée en contrat CES qui nous accompagnait a proposé à ce monsieur d'échanger son salaire avec ses 2 000 F mensuels " pour voir ce que c'est la misère et les huissiers qui vous poursuivent ". Essayant de changer de sujet, le directeur a entrepris de donner des conseils aux lycéens sur le choix de leurs études (en leur déconseillant de travailler dans la chaussure) mais " comment les enfants de ceux que vous mettez au chômage pourront-ils faire des études ? " lui ont lancé les lycéens. Les ouvrières lui coupaient la parole en rappelant qu'en envoyant la production se faire dans les pays du Tiers Monde, il allait faire travailler des enfants de 14 ans ! Et de nouveau, des lycéennes ont demandé à ce directeur au discours huilé " s'il n'avait pas honte de faire son sale boulot ". Les travailleuses et les travailleurs ont été profondément touchés par cette marque de solidarité, venant en particulier de ces jeunes qui n'ont pas mâché leurs mots. Les manifestants sont repartis sous les applaudissements des ouvrières de l'usine.

Le soir, ce sont les huiles de la région (député, conseillers régionaux et généraux...), réunies pour discuter du contrat État-Région dans une salle de la ville qui ont dû écouter des travailleurs de Myrys et les revendications des personnels de l'éducation en grève.

Mais les 240 derniers employés de l'entreprise ont appris qu'ils étaient licenciés avec une indemnité de 90 000 F et 20 mois de congé formation. Ils continuent leur lutte en essayant de faire pression sur les pouvoirs publics pour obtenir l'installation à Limoux d'entreprises de sous-traitance de l'aéronautique.

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