Les faux excédents de l'UNEDIC et la réalité du chômage07/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1656.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Les faux excédents de l'UNEDIC et la réalité du chômage

Le bureau de l'UNEDIC - l'organisme paritaire qui rassemble syndicats et patronat pour gérer l'ensemble des caisses Assedic et qui assure la rémunération d'une partie des chômeurs - a annoncé qu'il prévoyait un excédent financier de 6 milliards de francs pour l'année 2000. Et même, anticipant sur les chiffres à venir, un excédent probable de 14 milliards pour l'année 2001. Il s'en est suivi des prises de positions variées des syndicats, du patronat et du gouvernement sur l'utilisation la plus appropriée de ce que certains ont osé appeler une " cagnotte ".

Remarquons tout d'abord que cet excédent financier représente une part infime de l'ensemble des cotisations qui sont prélevées sur les seuls salaires, que ce soit la part salariale ou celle qualifiée de part patronale. Et même s'il était décidé des mesures particulières en faveur de certaines catégories limitées de chômeurs, ces améliorations ne pourraient malheureusement être que très marginales. Car cette amélioration des résultats financiers de l'UNEDIC provient pour l'essentiel non pas d'une amélioration de la situation du chômage mais du nombre toujours plus faible, en valeur absolue comme en proportion, de chômeurs indemnisés par l'assurance chômage. C'est la conséquence des mesures prises pour limiter le nombre de ceux qui peuvent recevoir ne serait-ce qu'une toute petite indemnisation.

En 1993, il y avait encore près de 53% des chômeurs qui bénéficiaient d'une indemnisation de l'assurance chômage. En 2000 ils ne sont plus que 41%, et pour la plus grande part cette indemnisation est inférieure à 6000 francs par mois. Pour prendre acte de l'aggravation de la situation réelle des chômeurs, il faudrait prendre en compte toutes les mesures prises par le gouvernement comme par ses prédécesseurs qui avaient pour but d'exclure du statut de demandeurs d'emplois, à l'ANPE et dans les statistiques, un nombre toujours plus grand de sans-emploi.

La contradiction entre les résultats financiers de l'UNEDIC et les chiffres réels du chômage est encore plus flagrante pour les années passées. En 1994, par exemple, l'excédent financier était de 8,4 milliards (en francs de l'époque), en 1995 de 22,4 milliards et en 1996 de 10,3 milliards de francs. A l'époque personne n'osait parler de " cagnotte " ni même de mettre en avant ces chiffres car on était dans les années où le chômage, même avec des chiffres maquillés, ne faisait que battre record sur record.

Le comble du cynisme dans cette affaire revient à Jospin qui a déclaré : " Les Français approuveraient sûrement que les partenaires sociaux mettent à profit la bonne santé financière de l'UNEDIC pour améliorer la couverture d'assurance chômage des salariés précaires que tous s'accordent à considérer comme insuffisante ". Cynisme, car si le nombre des salariés précaires, au niveau de leur emploi comme de leur salaire, a explosé ces dernières années, la politique du gouvernement Jospin n'y est pas pour rien. Tout a été fait pour mettre à disposition du patronat une main-d'oeuvre bon marché et précaire, comme, par exemple, décider de faire payer par les caisses-chômage une partie des salaires qui devraient être payés par l'employeur, des demandeurs d'emplois acceptant de prendre un contrat à durée déterminée. Et même, dernièrement, inciter les titulaires de l'Allocation Spécifique de Solidarité ou d'un CES, à prendre un emploi à temps partiel et très mal payé en leur assurant pendant un certain temps un complément minime de rémunération. D'une façon générale, aujourd'hui, les ANPE font pression pour que les demandeurs d'emplois acceptent de prendre non seulement des contrats à durée déterminée mais également des emplois à temps partiel, des contrats d'intérim ou des CES à 2 500 francs par mois. Et répondant aux exigences du patronat, le gouvernement pourrait encore plus faciliter l'utilisation de salariés à statut précaire. D'ailleurs le gouvernement est le premier à donner l'exemple. Des centaines de milliers de travailleurs sont employés avec des statuts précaires et à temps partiel, dans les services qu'il gère.

Le gouvernement pourrait prendre, s'il n'était pas totalement au service du patronat, les mesures de salut public indispensables et urgentes qui permettraient de résoudre sans délai la situation des millions de chômeurs officiels ou non du pays en arrêtant toutes les aides au patronat et en prenant sur les profits, les centaines de milliards qui permettraient de donner à tous un emploi utile et un salaire décent.

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