Le Crédit Commercial de France racheté : Quand les financiers jouent au " juste prix "07/04/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/04/une-1656.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Le Crédit Commercial de France racheté : Quand les financiers jouent au " juste prix "

La Hong Kong and Shanghai Banking Corporation (HSBC pour les intimes) qui, comme son nom ne l'indique pas, est une banque britannique, vient de faire une offre d'achat pour prendre le contrôle du Crédit Commercial de France (CCF) en proposant de mettre dans la corbeille un peu plus de 72 milliards de francs. Elle surenchérissait sur l'offre d'un actionnaire du CCF, la banque néerlandaise ING, qui avait tenté, sans succès, d'acquérir le CCF pour " seulement " dix milliards d'euros.

Si les Etats ne pensent qu'aux réductions budgétaires, les grands établissements financiers, eux, regorgent d'argent frais. Ce dernier épisode des rachats-fusions, qui se multiplient, en constitue une nouvelle illustration. En effet, cette offre d'achat " amicale " a été faite en argent liquide et en titres (sans qu'on ait plus de détails), signe que le bas de laine de la haute finance est bien garni.

Les 650 guichets du CCF vont donc changer d'enseigne. Et la banque française, dont une bonne partie des actionnaires appartenaient déjà au Bénélux, élargit donc sa dimension déjà en partie européenne. Que peut entraîner cette nouvelle fusion pour les salariés du CCF ? Les journaux, financiers ou pas, qui se penchent sur cette nouvelle n'y consacrent guère de place.

En revanche, ils assurent que cela constitue une très bonne affaire pour les actionnaires, et d'abord pour les plus gros, à commencer par l'actionnaire néerlandais, évincé de la course, qui pourra soigner ses frustrations de ne pas avoir pris le contrôle du CCF en empochant, au moment de l'échange des titres, une plus-value de près de six milliards de francs. Les autres gros actionnaires du CCF, belge et suisse, ne seront sans doute pas parmi les laissés-pour-compte.

Et pourquoi cette affaire est-elle devenue si juteuse ? C'est que, selon les termes du président de HSBC, John Bond, en se portant acquéreur de la septième banque française, il a décidé de payer ce qu'il appelle le " juste prix ", c'est-à-dire un prix représentant trois fois et demi le montant des actifs du CCF.

Et s'il estime que c'est le " juste prix ", c'est qu'en inventoriant les bonnes affaires qui ont assuré à ce jour la rentabilité du CCF, et la prospérité de ses actionnaires, il estime pouvoir rentrer rapidement dans ses fonds.

Etant donné que les autorités de tutelle, c'est-à-dire la Banque de France se sont montrées, selon le repreneur, " très professionnelles ", c'est-à-dire n'ont rien trouvé à redire à cette opération, celle-ci devrait donc recevoir un feu vert et le CCF, devenu HSBC-CCF, va continuer à rechercher de nouvelles plus-values financières. Comme ses concurrents, il louche maintenant vers le nouveau mirage de la finance : la banque à distance et Internet.

Est-ce que ces échanges d'actions et d'argent, en un mot de titres de propriétés, permettant à une poignée d'ultra-riches de devenir encore plus riches, vont améliorer quelque chose dans le fonctionnement de la société ? En aucune manière. Pire même, cette opération de concentration financière va donner une impulsion renforcée à de nouvelles opérations de spéculation, et contribuer à fragiliser encore plus le système financier. Jusqu'au prochain krach ?

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