Vendredi 10 mars, le tribunal de Dunkerque ordonnait aux grévistes de Pechiney de laisser la direction et les non-grévistes pénétrer dans l'entreprise et de permettre la sortie des marchandises, sous peine d'une astreinte de cinq mille francs par infraction !

En assemblée générale, des grévistes proposèrent d'abandonner l'usine à la direction, à ses cadres et à la quarantaine d'opérateurs non-grévistes. Cela aurait signifié le blocage quasi total de l'entreprise au bout de 24 heures, avec l'aluminium figé dans les cuves d'électrolyse, et un redémarrage de l'usine qui mettrait entre trois et six mois. Cela a été écarté, et la grève continue donc suivant les mêmes modalités, une soixantaine de grévistes continuant à assurer un service minimum pour que l'aluminium ne fige pas dans les cuves.

Samedi 11 mars, le directeur a pu rentrer dans l'entreprise ainsi que quelques cadres. C'est à peine si une discussion put avoir lieu concernant nos revendications, le directeur campant quasiment sur les mêmes positions qui avaient déclenché la grève : faire intégralement payer les 8 jours de repos supplémentaires accordés, entre autres par le blocage des salaires pendant un an et le gel de l'ancienneté pendant deux ans, et cela sans embauche d'opérateurs.

Quelques techniciens et superviseurs sont aussi entrés dans l'usine, mais ils ont choisi pour le moment de rester dans leurs bureaux plutôt que d'aller essuyer les quolibets des grévistes dans les ateliers qui travaillent.

Quant à la locomotive diesel que la direction voulait utiliser pour sortir un train de plaques d'aluminium, elle a ostensiblement refusé de redémarrer, elle aussi préférant sans doute le repos plutôt que le travail.

L'AG du lundi 13 mars a été la plus nombreuse qui se soit réunie depuis le début. Plus de 250 grévistes ont reconduit le mouvement à l'unanimité, avec une sereine fermeté et beaucoup d'applaudissements et de chansons.

Tout le monde s'attend à ce que la grève dure encore au moins toute la semaine, la direction semblant avoir reçu l'ordre de faire durer. Hors la soixantaine de grévistes obligés de travailler, un certain nombre se déplacent pour des actions extérieures comme de rendre visite aux ouvriers de Sollac-Dunkerque. De même, il était envisagé de se joindre à la manifestation des profs et des employés des impôts jeudi 16 mars à Lille. Par ailleurs des collectes commencent à être organisées.

Avec le moral et une détermination intacte, on se prépare à tenir pour faire plier la direction.