La grève aux impôts : Une lutte légitime17/03/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/03/une-1653.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La grève aux impôts : Une lutte légitime

Peu avant le 16 mars, date à laquelle les agents des impôts étaient appelés à nouveau par les syndicats à intensifier la grève et à manifester, le ministre de l'Economie, Sautter, avait annoncé que le " contrat d'objectifs et de moyens " qui prévoyait des suppressions d'emplois serait " suspendu " pour 2001 et 2002. " J'ai sous-estimé les inquiétudes des agents ", a déclaré le ministre, qui s'est souvenu tout à coup de son attachement au service public, de sa volonté de l'améliorer, notamment au service des " moins favorisés ", reconnaissant implicitement que le plan proposé allait dans l'autre sens. Il a déclaré que le rapport des deux hauts fonctionnaires sur lequel s'appuyait le gouvernement " appartient au passé ". C'est donc un premier recul du gouvernement, même s'il s'est refusé, dans les jours suivants, à parler de " retrait " de son projet, laissant entendre aux syndicats - qui se sont sentis floués ou ont fait semblant de l'être - qu'il chercherait leur appui pour le remettre sur le tapis prochainement.

A l'origine du mouvement des agents du fisc, un rapport commandé par le gouvernement affirme que faire entrer les impôts dans les caisses de l'Etat coûte plus cher en France que dans d'autres pays européens, d'où la recherche d'une diminution des coûts par une " rationalisation ". Air connu. Il est question d'un nouveau découpage entre la Direction générale des impôts et la Comptabilité publique, qui doit déboucher sur la création d'hôtels des impôts distincts pour les particuliers et pour les entreprises. A la faveur de cette réorganisation et d'une modernisation des services, le gouvernement compte réduire les quelque 160 000 emplois existants en ne remplaçant pas des départs en retraite alors que deux salariés des impôts sur cinq doivent partir d'ici à 2007.

La diminution des effectifs se traduirait également par la fermeture de centres des impôts dans des petites villes, dont certaines souffrent déjà de la suppression de services publics comme l'hôpital, sous prétexte, là encore, de " rationalisation " dans le cadre d'un schéma régional.

Que la perception des impôts ne soit pas des plus efficaces, c'est l'évidence même, mais pour bien d'autres raisons que celles invoquées officiellement. Seuls les revenus imposables des salariés sont transparents, au point d'ailleurs qu'un prélèvement à la source puisse être envisagé sans soulever de difficultés techniques majeures. Entre la TVA, la taxe sur les carburants et l'impôt sur le revenu, la machine à ponctionner ceux qui ont déjà du mal à joindre les deux bouts fonctionne sans faille. A l'autre extrémité de l'échelle sociale au contraire, tout le système est organisé pour multiplier les possibilités d'évasion fiscale.

Pour prélever ce qui est nécessaire sur les hauts revenus et, à la source, sur les bénéfices eux-mêmes, il faudrait que les travailleurs contrôlent la comptabilité des entreprises et de leurs dirigeants. Ainsi l'argent public rentrerait beaucoup mieux, et de façon bien plus avantageuse du point de vue des intérêts de la société.

Avec un tamis installé là où l'argent coule à flot, les impôts pourraient être réellement utiles, à condition qu'ils soient exclusivement consacrés aux hôpitaux, à l'enseignement, à la voirie, aux transports en commun, à la construction de logements et à tous les autres services utiles à la population, organisés localement ou sur un échelle plus vaste. Or actuellement, une grande partie de l'argent des impôts est reversée au grand patronat, sans compter ce qui est versé en cadeau aux banques comme intérêts sur la dette de l'Etat.

Mais la seule chose qu'ait envisagée le gouvernement, c'est de réduire les effectifs des agents des impôts pour réaliser des économies sur le dos des salariés comme il le fait dans d'autres secteurs ! Les agents des impôts ont bien raison de ne pas se laisser faire.

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