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Dans les entreprises
France Télécom : Fausse monnaie et vraies suppressions d'emplois
Après le bond de l'action de France Télécom (plus de 25 % en une seule journée), le journal financier La Tribune a pu titrer un de ses articles : " Les mises en garde se multiplient sur la bulle technologique ". Et de citer un banquier de la Caisse des dépôts et consignations qui parle de " Casino royal " tandis qu'un financier suisse s'inquiète des " évaluations incroyablement élevées des actions Internet ". A l'opposé de ceux qui parlent de " nouvelle économie de l'Internet " et de " fonctionnement rationnel des marchés ", celui-ci répond que les actions Internet sont soumises aux mêmes phénomènes que d'autres valeurs boursières, sans oublier la loi de la chute des corps...
Effectivement, si l'Internet représente une technique nouvelle, la hausse spéculative, elle, est tout ce qu'il y a de plus classique dans le fonctionnement de l'économie capitaliste. La spéculation touche actuellement les valeurs Internet, alors qu'elle a porté auparavant sur les valeurs asiatiques ou sur le marché immobilier. En fait de " nouvelle économie ", on ne fait que du vieux.
A l'origine de la hausse du cours des actions de France Télécom, il y eut d'une part l'annonce d'une nouvelle augmentation, bien réelle, des profits, d'autre part une petite phrase du PDG, Michel Bon, sur l'éventuelle mise sur le marché d'une filiale Internet... qui n'existe pas en tant que telle, en tout cas pas encore. Sur le total des sommes facturées par France Télécom l'année dernière, les activités liées à l'Internet représentaient moins de 3 %. Mais peu importe. " Le marché est prêt à donner une valeur démesurée aux valeurs Internet et nous pousse à introduire notre filiale ", a déclaré Bon. Toutefois, a-t-il ajouté, si l'introduction en Bourse de l'activité Internet venait entraver les abonnements combinés qui associent à Internet, la téléphonie fixe et mobile, " nous y renoncerons ". Bref, le président de France Télécom n'a rien décidé, il s'est contenté d'un lourd clin d'oeil aux possesseurs de capitaux.
Les sommes astronomiques atteintes par les actions de France Télécom à la suite de ces déclarations signifient qu'il s'est trouvé des riches suffisamment riches pour avoir les moyens de la surenchère.
Le gouvernement ne joue pas un jeu différent, en annonçant que l'Etat pourrait vendre une partie des actions qu'il détient encore. Le ministre de l'Economie, Sautter, s'est en effet déclaré prêt à faire encore baisser la participation de l'Etat, déjà réduite à 62 %, pour offrir à France Télécom la possibilité d'acheter une autre société si " la logique industrielle est décisive ". Et L'Humanité, pourtant bien disposée à l'égard du gouvernement, s'interroge : " Cette première réaction signifie-t-elle que les sirènes boursières que fait miroiter Michel Bon ont fait mouche auprès du ministre ? ".
Oui, le gouvernement écoute les " sirènes boursières ". Tout comme il accepte, alors que l'Etat reste encore l'actionnaire majoritaire, que soient supprimés 5 000 emplois par an depuis 1996, avec un accroissement de la précarité et du rythme de travail des employés de France Télécom, alors que les profits s'accumulent : 15 milliards en 1998, 18 milliards en 1999. Tout cet argent est désormais livré aux appétits du capital privé aguiché par la perspective de 18 000 nouvelles suppressions d'emplois dans les trois ans à venir. Nouvelle technologie ou pas, la spéculation s'alimente de vieilles recettes qui tirent la société en arrière.