Hôpitaux : Aubry recule... un peu, il faut continuer !10/03/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/03/une-1652.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Hôpitaux : Aubry recule... un peu, il faut continuer !

Suite aux grèves et aux manifestations des personnels des hôpitaux publics de ces trois derniers mois, Martine Aubry a annoncé le 25 février aux fédérations syndicales de la Santé une série de mesures qu'elle présente comme un nouveau départ pour l'hôpital.

Les syndicats ont jusqu'au 13 mars pour signer ce protocole, mais de toute façon la ministre annonce qu'elle l'appliquera.

Face au mécontentement qui s'est exprimé dans plusieurs dizaines d'établissements hospitaliers, Martine Aubry propose 10 milliards de francs pour l'ensemble des établissements publics, sur trois ans.

Dix milliards, c'est un chiffre qui peut faire illusion, mais il faut savoir que la somme totale versée par l'assurance maladie pour leur fonctionnement aux établissements hospitaliers publics représente, chaque année, environ 260 milliards. La somme annoncée par Aubry pour l'an 2000 - 3,8 milliards - ne représente donc qu'un peu moins de 2 % de cette somme.

Si Martine Aubry a voulu faire un geste, c'est un petit geste

Sur ces 3,8 milliards annoncés pour cette année, deux milliards seront destinés aux budgets de remplacement des personnels absents (congé maladie, formation, congés annuels, etc.). C'est à partir de ce chiffre que la ministre parle de 10 000 emplois, chiffre repris largement par la presse : mais il ne s'agit pas de créations d'emplois nouveaux (la somme est trop faible), mais plutôt d'un financement plus large des recours habituels des établissements aux contrats à durée déterminée, à l'intérim, voire même aux emplois-jeunes ou aux CES.

Ces deux milliards seraient reconduits en 2001 et 2002.

La création d'un Fonds de modernisation sociale est ensuite annoncée, fonds doté de 800 millions cette année. Sur ces 800 millions, 400 seraient destinés à l'amélioration des conditions de travail. Mais les autres 400 millions seraient destinés au volet social (!) des restructurations qui sont en cours : primes au départ volontaire, prime à la mobilité, formation de reconversion, etc. : difficile de faire passer ces sommes comme une prise en compte des revendications des personnels

Ensuite vient une série d'enveloppes : 100 millions pour les problèmes de sécurité, 400 millions pour le financement des investissements hospitaliers, 300 millions de francs pour les services d'urgences, avec entre autres la création de postes de praticiens hospitaliers (200 sur 2000 et 2001). Deux cents millions sont annoncés pour les instituts de formations en soins infirmiers, puisque le quota de places autorisées dans ces écoles passerait à 26 436, soit 8 000 places de plus.

Enfin, (ce qui est le plus volumineux dans le texte), on trouve un catalogue de voeux pieux et de bonnes intentions d'autant plus creuses que, d'emblée, aucun financement n'est prévu : le développement de la formation professionnelle, le renforcement de la participation des personnels au dialogue social, et beaucoup de bonnes paroles aux syndicats pour les caresser dans le sens du poil, c'est-à-dire pour leur annoncer qu'ils seront associés à la gestion de la mise en place de ces différentes mesures.

Avec ces différentes décisions, Aubry essaye de calmer le mécontentement et de mettre fin aux mouvements dans les hôpitaux. Ces sommes, évidemment, sont faibles, mais elles sont malgré tout à mettre à l'actif des manifestations : il est clair que si les personnels n'avaient pas manifesté, Aubry n'aurait même pas donné cet argent.

Mais malgré tout, ces 10 milliards sur trois ans sont bien loin de ce qu'il faudrait par exemple pour assurer un remplacement correct des absences dans les établissements. C'est justement sur ce problème-là que le mouvement a démarré dans un certain nombre d'hôpitaux : lorsqu'un agent est en congé maladie, l'encadrement le remplace en changeant les horaires ou les jours de repos des collègues. Le minimum, ce serait que dans chaque établissement il y ait une équipe de remplacement suffisamment étoffée pour pouvoir faire face à ces situations sans que cela retombe sur le reste de l'équipe. Ce serait un minimum, mais cela voudrait dire des dizaines de milliers d'embauches de titulaires dans l'ensemble des établissements, ce dont il n'est pas question dans les décisions d'Aubry.

Aubry a trouvé dix milliards pour les hôpitaux alors qu'il y a peu elle affirmait que cela n'était pas possible. Cela fait dire à certains qu'avec trois fois plus de manifestants et d'hôpitaux touchés en lutte, il aurait été sans doute possible d'obtenir bien plus. Et rien ne dit en effet que ces mesures vont satisfaire la partie du personnel qui s'est mobilisée depuis trois mois. Rien ne dit donc qu'Aubry ne soit pas déçue dans ses espoirs d'un retour au calme, et qu'elle en ait fini avec les manifestations de personnels hospitaliers !

Partager