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Leur société
Charte de l'enseignement professionnel intégré : Encore un mauvais coup
En mai 1999, le ministère de l'Education nationale présentait la " charte de l'enseignement professionnel intégré ", qui concerne les lycées professionnels (LP) qui préparent au BEP et au bac professionnel.
Cette charte suscite beaucoup d'inquiétude auprès des enseignants concernés. En effet, elle annonce un renforcement du partenariat avec les entreprises dans le cadre du " développement économique local ", qui adapterait les types de formation aux besoins des entreprises de la région. Toujours dans l'idée de renforcer ses liens avec les entreprises, les LP s'ouvriraient à la formation continue des adultes.
Cette charte ne sera donc pas sans conséquences, sur la formation donnée aux élèves d'une part, et sur les conditions de travail des personnels des LP d'autre part.
Pour les élèves, il est question de mettre encore plus l'accent sur les stages en entreprises (aujourd'hui 16 semaines sur 2 ans pour les bac pro !). Du coup, plus qu'aujourd'hui, les entreprises auraient leur mot à dire sur les programmes et l'évaluation des élèves. L'enseignement général en particulier risque de faire les frais de cette orientation.
En ce qui concerne les enseignants, le gouvernement entend bientôt faire passer un décret visant à modifier leur statut. Les " professeurs de lycée professionnels " (PLP) sont les enseignants titulaires, mais il y a aussi parmi eux un nombre non négligeable de précaires, les maîtres-auxiliaires, les contractuels entre autres. Le projet annonce la couleur. Aujourd'hui, les PLP sont tenus à 18 heures de cours (pour certaines spécialités à 23 heures), plus toutes les obligations de service, tels les conseils de classe, les préparations des sujets d'examen, leur correction, etc. Lorsque les PLP ont une classe en stage, ils sont évidemment libérés des cours correspondants mais la gestion des élèves en stage leur incombe (suivi, visite). C'est sur cette idée de cours non rendus que s'appuie le projet d'annualiser les PLP. Une comptabilité des heures de cours serait tenue pour chaque enseignant. Elle prévoit un décompte d'heures pour chaque élève que l'enseignant " suit " lors du stage, qui sous-estime le travail fourni. Ainsi un enseignant pourrait être " créditeur " ou " débiteur " d'heures. Il est question pour un enseignant " débiteur " de compléter son service dans un autre établissement. Annualisation, flexibilité, voilà la teneur de ce projet.
Le mécontentement des enseignants tient surtout au fait que tout cela s'inscrit dans le cadre d'une dégradation des conditions de travail.
Allègre, à la suite d'un certain nombre d'actes de violence commis dans les établissements scolaires et rapportés par les médias, préconisait dimanche dernier à la télévision " plus de présence enseignante dans les établissements ". Mais qu'est-il prévu pour cela ? Plus d'enseignants ou d'adultes embauchés dans chaque établissement ? Pas du tout ! Mais bel et bien plus de présence dans l'établissement pour chaque enseignant ! Et c'est de fait déjà ce qui se met en place. Les sollicitations sont quotidiennes pour " gérer les conflits ", " concerter " dans telle ou telle équipe pédagogique (sans parler du fait que les vacances d'été sont écourtées de deux semaines pour les PLP).
Le projet de réforme du statut des PLP annonce un projet plus général pour l'ensemble de l'Education nationale. Il n'est pas question pour le gouvernement de donner de réels moyens, matériels et humains, pour un encadrement et une formation satisfaisants des élèves. Ce sera, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, aux enseignants, aux personnels des établissements de gérer au mieux, de s'investir voire de " mériter tel ou tel établissement ".
Le 3 février, les lycées professionnels sont appelés à la grève et à manifester pour rejeter ce projet. Et dans bien des établissements se sont tenues ou vont se tenir des assemblées pour discuter de la nécessité de parer ces nouveaux mauvais coups du gouvernement.