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Tanzanie : La mort de Nyerere
Julius Nyerere, ancien président de Tanzanie, est mort le 14 octobre dernier, dans un hôpital londonien. Il avait conduit à l'indépendance l'ancienne coloniebritannique.
C'est en 1954 que ce jeune intellectuel, après avoir suivi des études d'histoire au Royaume-Uni, se fit connaître en accédant à la présidence de la TAA, la Tanganyika African Association, une organisation nationaliste africaine, créée quelque 20 ans plus tôt.
En 1954, le Tanganyika était sous domination britannique. Dans le contexte d'émancipation coloniale qui marquait l'après-Deuxième Guerre mondiale, la Grande-Bretagne attribua une représentation séparée mais clairement inégalitaire à la population noire du Tanganyika, ce qui conduisit la majorité africaine à être de plus en plus sensible aux revendications nationalistes. Sous l'impulsion de Julius Nyerere, la TAA devenue la Tanganyika African National Union (TANU), compta, trois ans après sa fondation, un demi million d'adhérents.
Son combat nationaliste " pour que le Tanganyika devienne autonome et indépendant " trouva le soutien des mouvements coopératifs et syndicaux. La TANU, accentuant la pression sur la Grande- Bretagne, sans jamais recourir à la violence, s'affirma, auprès des instances internationales, comme la seule formation en mesure de négocier l'indépendance du territoire, qui lui fut finalement accordée le 9 décembre 1961. Son dirigeant, Julius Nyerere, se retrouvant alors à la tête du gouvernement, fit le choix de n'y rester que 6 semaines pour pouvoir se consacrer au renforcement de la TANU. Puis, il se fit élire, à une très écrasante majorité, président de la République, le 9 décembre 1962, son adversaire ne recueillant que 3 % des voix.
Le 24 avril 1964, se constitua la République unie de Tanzanie, réunissant le Tanganyika et Zanzibar.
Nyerere gouverna jusqu'en 1985, se retirant alors volontairement de la présidence.
L'époque de Julius Nyerere fut considérée comme celle du " socialisme africain ", un " socialisme " qui s'apparentait plus à un nationalisme soucieux de conserver une partie des richesses autrefois totalement pillées par les puissances coloniales.
Sur le plan international, on lui tressa l'auréole d'un dirigeant " à la farouche volonté d'indépendance vis-à-vis des grandes puissances ". Il apporta son soutien à de nombreux partis politiques et à des mouvements de libération engagés dans la lutte contre les puissances coloniales. En 1978, Nyerere envoya des troupes en Ouganda contre le dictateur Idi Amin Dada. Il protesta contre " l'attitude arrogante, provocante et mercantile " de la France qui vendait des armes au régime raciste de Pretoria, et se fit un chef de file du " non-alignement ".
Nyerere consacra son existence à tenter vainement de rendre viable le petit Etat de Tanzanie. Il voulait, disait-il, que dans " son " pays, on puisse " travailler ensemble pour le bien de tous ". Mais, en 1975, le revenu moyen par tête d'habitant restait inférieur à 400 francs par mois. Il refusa de céder aux " diktats " du FMI, parce que, affirmait-il, " si nous acceptions ces conditions, il y aurait des émeutes dans les rues de Dar es-Salaam ". C'est donc la crainte de la révolte des plus pauvres et des plus déshérités qui l'inspira, et non la volonté de s'appuyer sur cette révolte pour renverser l'ordre impérialiste.