La sécurité... de moins en moins sociale01/10/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/10/une-1629.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

La sécurité... de moins en moins sociale

Le budget de la Sécurité sociale pour l'année 2000, présenté par Martine Aubry, ferait ressortir un excédent au titre du régime général (maladie, vieillesse, famille et accidents du travail) d'environ 2 milliards de francs. Quel changement après quatorze années de prétendu déficit de la Sécurité sociale et après les 4 milliards de déficit encore annoncés pour 1999 ! On ne devrait donc plus nous rebattre les oreilles avec le " trou de la Sécu " et les sacrifices nécessaires, à répétition, pour le combler ? Mais si !

Il ne s'agit là que d'estimations, expliquent les experts, soumises à bien des aléas, parmi lesquels le passage aux 35 heures, dont les conséquences sur la masse salariale, avec les exonérations de cotisations sociales accordées au patronat, ne sont pas encore mesurables. Pour Martine Aubry et le gouvernement cette perspective de redressement et d'équilibre reste très " fragile " et exige une " maîtrise renforcée des dépenses de l'assurance maladie ". Car si les branches vieillesse et famille devraient présenter un bilan positif en 1999 comme en 2000, l'assurance maladie, elle, continuera d'afficher un déficit important, de près de 12 milliards pour 1999, près de 4 milliards en 2000, selon les calculs gouvernementaux.

Ces chiffres s'expliqueraient par le fait que l'assurance maladie serait victime de la consommation intempestive de médicaments par la population. Les dépenses pharmaceutiques ne représentent pourtant que 18 % des dépenses totales de santé et seulement 13,6 % des remboursements de la Sécurité sociale (contre, par exemple, 52,6 % pour les dépenses d'hospitalisation). Mais Martine Aubry revient à la charge en dénonçant à nouveau une prétendue consommation trop importante de médicaments et en annonçant que 286 nouveaux produits pourraient ne plus être remboursés ou ne seraient plus remboursés qu'à moindre taux. De même, il serait question de traquer les arrêts maladie qualifiés d'abusifs et d'imposer aux médecins de préciser à chaque fois les motifs des arrêts qu'ils prescrivent.

Sous prétexte de renflouer les caisses de la Sécurité sociale, Martine Aubry et le gouvernement Jospin entendent ainsi continuer à rogner sur les moyens de santé de la population, et en particulier sur ceux des familles les plus pauvres. C'est là un pas de plus dans la voie d'une médecine à deux vitesses, d'une médecine pour les riches qui, quel que soit le coût des soins nécessaires, quel que soit le taux de remboursement, ont les moyens de se soigner en France, aux Etats-Unis ou ailleurs.

Personne ne va chez le médecin et chez le pharmacien par plaisir. S'il y a abus, il doit être cherché du côté du gouvernement qui prépare de telles mesures sans envisager de s'en prendre aux profits de la très florissante industrie pharmaceutique (130 milliards de chiffre d'affaires).

Ce qui est abusif, c'est aussi le fait que de très nombreux salariés ne s'arrêtent pas en maladie, à cause de la pression de la direction des entreprises, alors qu'ils le devraient. Le président d'un syndicat de médecins généralistes réagissait aux propos de Martine Aubry en déclarant : " Jusqu'à présent, il fallait presque forcer les gens à s'arrêter. Ils avaient peur de perdre leur emploi ". Mais c'est cette conception de la Sécurité sociale que voudrait renforcer Martine Aubry !

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