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Leur société
Du plomb dans l'eau du robinet... mais des profits en or
L'eau du robinet est-elle potable ? Plusieurs reportages télévisés ont fait état d'analyses montrant que nous buvons bien souvent une eau trop chargée en plomb. Le dernier numéro de Que Choisir ? revient sur ce sujet.
La toxicité du plomb est connue depuis longtemps. À doses massives dans le sang, il provoque le saturnisme et son danger chez les travailleurs exposés est connu depuis longtemps en médecine du travail. Autre source de contamination : le rejet de poussières ou la contamination des sols par des industries polluantes. Les peintures (interdites) comportant des pigments au plomb dans les logements anciens sont aussi responsables de nombre de cas de saturnisme.
L'autre danger, sous-estimé jusque-là, est la présence, même à faible concentration, du plomb dans l'eau du robinet.
Même à faible dose, parce qu'il s'accumule dans l'organisme, en particulier chez les enfants (qui n'en éliminent que 50 %), il peut en effet entraîner des troubles du comportement, de l'audition, de la mémoire ainsi que des anomalies de développement du foetus chez les femmes enceintes.
C'est ainsi que sur les recommandations de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les directives européennes prévoient maintenant une valeur maximale de 25 µg/l de plomb à atteindre dans les 5 ans et de 10 µg/l dans les 15 ans.
La norme admise était jusque-là de 50 µg/l. Mais même cette valeur est souvent loin d'être respectée aujourd'hui. Que Choisir ?, qui a effectué plusieurs prélèvements à Paris et dans plusieurs villes de province, cite plusieurs cas de concentration de 150, 200 voire 570 µg/l.
Le plomb présent dans l'eau du robinet provient principalement des branchements en plomb raccordant le réseau à l'installation intérieure de distribution et des canalisations en plomb dans les réseaux intérieurs. L'eau, en particulier quand elle est peu minéralisée, dissout le plomb quand elle passe ou stagne dans les canalisations. L'utilisation de plomb au niveau des canalisations est interdite depuis avril 1995 et au niveau des brasures depuis 1997. Mais il reste le réseau existant.
Sur 26,3 millions de logements en France, 10 millions possèdent un réseau en plomb et sur 10,3 millions de branchements, 3,9 millions sont en plomb. Le coût de remplacement est évalué à 120 milliards de francs (100 milliards pour les canalisations et 20 milliards pour les branchements). Qui va payer ?
Le marché de distribution de l'eau est accaparé par une poignée de grosses compagnies, Vivendi (ex-Générale des Eaux), la Lyonnaise des Eaux et Saur (Bouygues). La Lyonnaise des Eaux n'y va pas par quatre chemins, l'addition, c'est au consommateur de la payer. Elle signale, dans une publication sur ce sujet, que 3,2 millions de branchements sont sous sa responsabilité dont 1,1 million en plomb. " Coût du remplacement d'un branchement : 5 000 F en moyenne, soit 5,5 milliards de francs. Cela représente en moyenne pour les consommateurs, un effort de 50 centimes par m3, soit 2 % du prix de l'eau. " Quitte à étaler chiffres et calculs, la Lyonnaise pourrait mettre noir sur blanc les profits réalisés dans la distribution de l'eau et combien ces milliards représentent en pourcentage de ses bénéfices. De même pour Vivendi, qui a accumulé tellement de profit sur le marché de l'eau qu'elle se jette sur tout ce qui peut être privatisable dans les domaines des transports, des cliniques et la communication.
Alors, les comptes de ces compagnies n'ont pas de plomb dans l'aile. À elles de payer cette remise aux normes, pas aux contribuables ni aux consommateurs.