Les responsabilités de la gauche de gouvernement31/05/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/06/2861.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Les responsabilités de la gauche de gouvernement

Dans le Journal du Dimanche du 28 mai, les principaux dirigeants de la gauche, Olivier Faure pour le PS, Mathilde Panot pour LFI, Fabien Roussel pour le PCF et Marine Tondelier pour EELV, ont signé, en commun avec les dirigeants syndicaux et diverses associations, une tribune appelant « l’État français à ne pas sacrifier Fret SNCF ».

Selon l’appel, il faut « sortir le fret ferroviaire du marché de la concurrence et créer un grand service public, unifié et cohérent, de transport ferroviaire et routier de marchandises ». L’appel serait moins hypocrite si les gouvernements de gauche n’avaient pas eux-mêmes largement mis en œuvre la privatisation du fret ferroviaire comme du transport de voyageurs et organisé son dépeçage.

En février 1997, la SNCF était coupée en deux : RFF (Réseau Ferré de France) héritait de la propriété et de la gestion du réseau tandis que la SNCF devenait un simple exploitant ferroviaire, susceptible d’être mis en concurrence. La droite avait voté cette séparation, et Gayssot, ministre PCF des transports dans le gouvernement de Jospin, se chargea des décrets d’application. Ce gouvernement dit « de gauche plurielle » de 1997 à 2002, intégra aussi Mélenchon en son sein et eut d’ailleurs le triste record du nombre de privatisations de la Ve République.

Le fret ferroviaire fut le premier secteur à être soumis à la concurrence en 2006, sous Chirac. La convention collective du fret mise en place par le patronat ferroviaire fut très régressive. Au lieu du miracle promis de développement du fret, son trafic a au contraire été divisé de moitié depuis cette date et les effectifs de cheminots ont été laminés.

Revenant au pouvoir en 2012 avec Hollande, la gauche se garda bien de revenir sur cette catastrophe ou de créer ce « grand service public du transport ferroviaire » aujourd’hui réclamé. Au contraire, malgré une grève des cheminots de deux semaines en juin 2014, elle transféra les 50 000 cheminots chargés de l’infrastructure dans une nouvelle structure baptisée SNCF Réseau. Ensuite, le gouvernement socialiste organisa l’ouverture à la concurrence du transport de voyageurs. En vue du transfert des cheminots au privé au gré des appels d’offres, il publia, en 2016, un décret socle, calqué sur les dispositions régressives de la convention collective du fret pour les étendre à l’ensemble de la branche ferroviaire. Macron, quant à lui, a fait supprimer le statut des cheminots en 2020 pour mieux les soumettre à cette convention collective.

Il y a donc eu dans le domaine de la privatisation du transport ferroviaire, une parfaite continuité entre la gauche et la droite. Les conséquences en sont catastrophiques, tant sur le plan social qu’environnemental : le fret ferroviaire ne représente plus que 9 % du trafic de marchandises contre 46 % encore en 1974. Le trafic routier a, de son côté, explosé.

Les signataires de l’appel écrivent que « le gouvernement français doit s’opposer à cette épée de Damoclès de l’Union européenne sur Fret SNCF. » Comme si le gouvernement, ainsi que ceux qui l’ont précédé, n’étaient pas complices et même principaux instigateurs de la privatisation des équipements publics.

Les travailleurs du rail comme de l’ensemble de la société ne doivent se fier qu’au rapport de force qu’ils pourront opposer à un capitalisme aussi irresponsable que parasitaire.

Partager