Italie : une attaque et une provocation contre les travailleurs10/05/20232023Journal/medias/journalarticle/images/2023/05/P11-1_Le_1er_mai_a_Turin_C_LO.jpg.420x236_q85_box-0%2C16%2C800%2C465_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : une attaque et une provocation contre les travailleurs

En réunissant le conseil des ministres le 1er mai afin de présenter un décret qui s’attaque aux travailleurs, on peut dire que Giorgia Meloni, la dirigeante d’extrême droite du gouvernement italien, a choisi son moment.

Illustration - une attaque et une provocation  contre les travailleurs

Les dirigeants syndicaux, en particulier celui de la CGIL, Landini, ont bien dénoncé « l’arrogance du gouvernement », qui détourne ainsi la journée du 1er Mai, mais leur indignation ne les a pas empêchés de se rendre sagement à la rencontre convoquée par Meloni la veille. Cette dernière a affirmé que le conseil des ministres du 1er mai était « une façon de participer à la fête des travailleurs en amenant quelque chose de bon ». Ce quelque chose peut être bon aux yeux de sa base électorale petite-bourgeoise et antiouvrière, sans aucun doute, et est indéniablement favorable aux intérêts patronaux.

La mesure phare du décret en question est la suppression du revenu de citoyenneté, équivalent du RSA, tandis que quelques miettes sont distribuées à une partie des salariés, bien évidemment sans que le patronat ne débourse un centime. C’est par une mesure fiscale, limitée à six mois, que les travailleurs aux salaires les plus bas pourront économiser au maximum 100 euros par mois pendant cette période. Autant dire que ce n’est pas ce qui donnera aux familles populaires les moyens de faire face à la flambée des prix.

Les quelques sous que l’État versera dans les poches de ces travailleurs seront donc ôtés de celles des plus pauvres, avec la suppression du revenu de citoyenneté. Mise en place par le gouvernement Conte, cette bien faible allocation – 500 euros maximum pour une personne seule – permettait à une famille sur trois de tout juste garder la tête hors de l’eau. Elle sera remplacée par de nouveaux dispositifs dont le simple nom est déjà une déclaration de guerre aux travailleurs. Le « chèque d’inclusion » ne sera attribué qu’aux familles pauvres dont au moins un membre est âgé de plus de 60 ans, ou mineur, ou encore reconnu handicapé. Elles y auront droit pendant 18 mois, puis devront respecter un délai d’un mois avant de renouveler leur demande pour une nouvelle période raccourcie cette fois à 12 mois. C’est qu’il ne faudrait pas « laisser des familles s’installer dans l’assistanat » a argumenté un de ses ministres ! Quant à tous ceux faisant partie d’une catégorie définie « employable », au sempiternel prétexte d’encourager au travail, ils auront droit à une aumône de 350 euros par mois, à condition d’accepter formations bidon et autres stages et travaux d’utilité publique.

Ces mesures vont précipiter dans la misère bien des familles, en particulier dans les régions du sud, où les taux de chômage sont très élevés. Elles sont, comme il se doit, accompagnées de facilités offertes au patronat, grand et petit, pour lui faciliter les conditions d’embauche, et surtout de débauche, des travailleurs. Les emplois en CDD sont facilités et les contrôles pour vérifier qu’il ne s’agit pas de CDD abusifs quasi supprimés. Le recours à des travailleurs payés en chèques-emplois, censés rémunérer des prestations occasionnelles, est élargi, ce qui permettra par exemple aux parcs d’attractions ou aux établissements de tourisme de profiter d’une main-d’œuvre d’appoint ultra-flexible. Pour plaire aux patrons d’hôtels et de restaurants, les contrats d’apprentissage du secteur touristique et thermal sont désormais ouverts sans limite d’âge, pour une durée de trois ans, et l’État prévoit même un contrat d’apprentissage réservé aux chômeurs de plus de 40 ans pour ce secteur qui peine à recruter tant les salaires y sont bas pour des conditions de travail éreintantes.

S’attaquer aux chômeurs et aux bénéficiaires d’aides permet d’imposer à tous les travailleurs d’accepter n’importe quel travail à n’importe quel prix, pour le plus grand bénéfice du patronat, avec en prime une bonne dose de démagogie cherchant à opposer les travailleurs entre eux. La riposte des trois grandes confédérations syndicales – CGIL, CISL, UIL – s’est bornée à un appel à manifester trois samedis de suite – pour ne pas gêner l’économie – en ordre dispersé, d’abord à Bologne, puis à Milan et ensuite à Naples. Mais face à ce mépris et à ce cynisme, une véritable réaction des travailleurs sera indispensable.

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