Hôpitaux publics : l’impasse de l’intérim05/04/20232023Journal/medias/journalarticle/images/2023/04/P6-2_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C173%2C450%2C427_crop_detail.jpg

Leur société

Hôpitaux publics : l’impasse de l’intérim

Depuis le 3 avril, la rémunération des médecins intérimaires dans les hôpitaux publics est plafonnée. Cette mesure gouvernementale est censée soulager les finances des hôpitaux, mais suscite des inquiétudes sur leur capacité à disposer d’assez de médecins.

Illustration - l’impasse de l’intérim

La pénurie de médecins touche les hôpitaux depuis longtemps, aggravée par le manque dramatique de médecins de ville. Dans cette société, la santé publique n’échappe pas à la loi du marché : les hôpitaux s’arrachent les médecins disponibles, en rémunérant les gardes de 24 heures à des tarifs parfois exorbitants. Ainsi certains anesthésistes, chirurgiens, obstétriciens ou pédiatres très demandés assurent des remplacements au prix de 4 000 et même 5 000 euros la journée. Des médecins sont devenus de véritables mercenaires profitant à fond d’un marché où ils sont en position de force. D’autres, déjà en poste, prennent sur leurs congés pour boucher les trous d’autres hôpitaux et sont rémunérés plus raisonnablement de 2 000 à 2 500 euros par jour.

Globalement, le coût de l’intérim médical est évalué à 1,5 milliard d’euros par an pour les hôpitaux publics. Le gouvernement voudrait s’attaquer à cette dépense, dont la politique de l’État, qui a voulu faire des économies sur la santé en limitant le nombre de médecins, est entièrement responsable.

Les représentants des médecins intérimaires protestent évidemment contre la limitation à 1 390 euros brut du paiement pour la journée de remplacement. Selon eux, ce tarif n’intéressera plus les intérimaires potentiels. Ils prédisent carrément la fermeture imminente de 167 services dans une centaine d’hôpitaux en manque de médecins, donc gros utilisateurs d’intérimaires. Leurs pressions sur le gouvernement ont beaucoup retardé la mise en œuvre du plafonnement à présent en vigueur : la loi date de 2016 et le premier tarif plafonné de 2018. Il n’a pas été appliqué et une seconde loi a été votée en 2021. Puis le ministère de la Santé a reculé à plusieurs reprises son application, finissant par fixer un tarif à 1 170 euros, qu’il a augmenté de 20 % juste avant le 3 avril.

Quel effet aura le plafonnement ? La Fédération hospitalière de France, regroupant les hôpitaux publics, se veut rassurante, assurant que peu de services fermeront par manque d’intérimaires, car des établissements ont déjà déprogrammé l’activité. Autrement dit, les lits sont fermés d’avance, les soins limités, les directeurs d’hôpitaux rassurés, et tant pis pour les malades.

Les économies budgétaires ont donc entraîné une hausse des dépenses avec un recours croissant à l’intérim médical d’un côté et de l’autre, en retour, des fermetures de lits par manque de personnel. Le gouvernement louvoie entre ces écueils et pilote à vue un système hospitalier naufragé.

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