Ehpad : les profits d’abord19/01/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/01/2842.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Ehpad : les profits d’abord

En mai 2021, la défenseure des droits faisait un rapport sur la situation des personnes âgées hébergées en Ehpad et l’assortissait de recommandations aux directions de ces maisons de retraite, aux responsables des services sociaux et au ministère chargé de les contrôler.

Dix-huit mois plus tard, elle publie un bilan qui reste, selon ses propres mots, « extrêmement pré­occupant ».

Une façon diplomatique pour dire que rien n’a changé, entre autres du côté du ministre de la Santé, qui n’apporte pas de « réponse explicite », en particulier à la demande de la défenseure d’imposer un encadrement minimum de huit soignants ou animateurs pour dix résidents.

Pourtant, comment traiter humainement les personnes âgées sans le personnel nécessaire ? Des familles dénoncent régulièrement l’isolement excessif de leurs parents, les toilettes ou les soins faits à des heures tardives, les douches rares, les journées passées en pyjama ou au lit, les entraves aux visites sous prétexte de respecter des normes sanitaires appliquées de façon disproportionnée.

Les résidents en souffrent, le personnel également, épuisé et culpabilisé, maltraité lui aussi par des gestionnaires dont le critère est la rentabilité, qui multiplient les emplois précaires, les conditions de travail indignes et les salaires au rabais. Dans les Ehpad, privés ou publics, l’économie est la règle.

Pour le moment, les groupes privés comme Orpea, cloué au pilori par le livre Les Fossoyeurs, et Korian dominent le marché prétendument haut de gamme, et font face à une bonne partie des 280 plaintes déposées de mai 2021 à octobre 2022.

Interviewé par le Journal du Dimanche, le nouveau directeur général d’Orpea se vante d’avoir renvoyé les dirigeants corrompus, d’avoir assaini la situation mais il s’inquiète de faire face à de nombreuses dettes. « Historiquement, dit-il, Orpea dégageait des marges autour de 26 %. (…) Elles sont tombées à 17 %, nous devons les redresser. » Et, sans vergogne, il réclame une augmentation « des dotations publiques, attribuées selon des critères d’autonomie de la personne ».

Pourquoi se gênerait-il ? Depuis des années, l’État a abandonné de plus en plus la santé publique aux établissements privés, cliniques ou hôpitaux ; comment décevoir les actionnaires du marché dit « de l’or gris », en pleine expansion, qui pèse plus lourd que les recommandations de la défenseure des droits ?

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