Procès du vol Rio-Paris : Airbus et Air France intouchables ?21/12/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/12/2838.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Procès du vol Rio-Paris : Airbus et Air France intouchables ?

Mercredi 7 décembre, au terme d’un procès de neuf semaines, les procureurs du tribunal correctionnel de Paris ont demandé la relaxe des entreprises Airbus et Air France, jugées pour homicide involontaire dans l’accident du vol Rio-Paris, qui a coûté la vie à 228 personnes le 1er juin 2009.

Pendant le procès, les deux entreprises avaient déployé une armada d’avocats, experts, pilotes, ingénieurs et dirigeants des agences de sécurité aérienne. Ils ont défilé à la barre pour attribuer l’entière responsabilité de l’accident aux seuls pilotes, tous trois décédés et au fond de l’Atlantique. À les entendre, Airbus n’est coupable d’aucune négligence technique, et Air France d’aucun manquement dans la formation de ses pilotes.

Pourtant, dès octobre 2009, le président du syndicat des pilotes d’Air France affirmait que la panne initiale des sondes permettant de mesurer la vitesse et l’altitude de l’avion avait joué un rôle déterminant. Selon lui, l’accident « aurait sans doute pu être évité » si Airbus avait changé ces sondes plus tôt. Depuis, plusieurs rapports du BEA (Bureau d’enquêtes et d’analyses pour la sécurité de l’aviation civile) ont confirmé ce diagnostic. Le BEA a aussi montré que le déclenchement d’un système d’alarme incompréhensible et oppressant a achevé de faire perdre le contrôle de l’avion aux pilotes. Enfin, il a souligné que ceux-ci n’avaient pas été suffisamment formés pour faire face à une urgence de ce type à haute altitude.

Mis en examen pour homicide involontaire en mars 2011, Airbus et Air France ont multiplié les contre- expertises pour se dédouaner de leurs responsabilités et éviter ou retarder les procès. En 2019, ils avaient déjà obtenu un non-lieu à l’issue de leur premier passage au tribunal de grande instance de Paris. Pour que se tienne le récent procès en appel, il avait fallu toute la ténacité des familles de victimes.

Les représentants des familles des victimes ont exprimé leur indignation lors du réquisitoire. La présidente de l’association Entraide et Solidarité AF 447 a déclaré : « on a un procureur qui est censé défendre le peuple et qui finalement défend la multinationale Airbus. » Le jugement du tribunal correctionnel sera rendu en avril 2023. En attendant, la longueur de la procédure et le dernier réquisitoire du parquet confirment que la vie de 228 personnes ne pèse pas grand-chose face aux intérêts de deux géants de l’industrie aéronautique.

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