Hôpital en crise : une “situation complètement inédite” ?07/12/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/12/2836.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Hôpital en crise : une “situation complètement inédite” ?

À en croire un représentant de Santé publique France, lors du point presse du 2 décembre, c’est une « situation complètement inédite » de triple épidémie qui percute le système de santé déjà mal en point.

En ce mois de décembre, la grippe vient s’ajouter, précocement paraît-il, à une remontée du Covid et à l’épidémie annuelle de bronchiolite, plus virulente que d’habitude selon des spécialistes. Cette co-circulation virale risque de provoquer un engorgement encore plus problématique des services d’urgence, et de l’hôpital en général, déjà dans une situation critique. Cette triple épidémie survient dans des conditions météorologiques qui rendent moins efficaces les défenses naturelles, ajoute un épidémiologiste, comme pour noircir le tableau.

Les autorités de santé, le ministre François Braun reprenant les propos de la Première ministre, appellent donc les personnes les plus fragiles à se faire injecter leur dose de rappel vaccinal, et à appliquer les gestes barrières dans les lieux très peuplés et lors des futures fêtes de fin d’année, période propice à la transmission des virus. C’est bien le minimum.

Mais ce minimum, pour répondre à l’urgence de cette « situation complètement inédite », ressemble fort à un détournement de responsabilité. Santé publique France signale un retard dans le nombre de vaccinés à l’approche de la 9e vague de Covid, et même un pourcentage insuffisant de vaccination contre la grippe saisonnière ? Mais la moindre des politiques de prévention serait de rendre ce dernier vaccin gratuit pour tous, et même d’obliger les entreprises et administrations à organiser des séances collectives.

Et surtout, si l’hôpital craque, est menacé une nouvelle fois de rupture, risque de ne pas pouvoir faire face, et ce dans un des pays les plus riches du monde, ce n’est une surprise pour personne et surtout pas pour les soignants et les autres travailleurs hospitaliers. L’hôpital est littéralement asséché depuis des décennies, dépouillé par les gouvernements successifs des moyens qui permettraient de garder son personnel dans des conditions correctes de travail et de salaire. Si des milliers de lits d’hospitalisation manquent, si plus de 4 300 ont encore été fermés l’année dernière, c’est essentiellement parce que manquent à l’appel les infirmiers, aides-soignants, agents de service, techniciens, médecins, etc., indispensables à leur fonctionnement.

Le dernier budget de la Sécurité sociale voté, qui prévoit une augmentation de 4,1 % pour l’hôpital avec une inflation officielle de 6,2 % sur l’année, organise donc un déficit supplémentaire, où les milliards d’euros s’ajouteront aux milliards qui manquent déjà. Où prendre donc de quoi embaucher avec des salaires attractifs, comme disent les économistes, de quoi rémunérer correctement les soignants qui restent, leur permettre de prendre leurs congés, diminuer l’insupportable tension, leur assurer des emplois du temps normaux dans des équipes normales ?

Si l’hôpital vacille mais tient, c’est grâce à la conscien­ce sociale de son gros million de travailleurs, et malgré la politique gouvernementale.

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