Italie : pluies diluviennes, incurie mortelle30/11/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/11/2835.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : pluies diluviennes, incurie mortelle

À l’aube du samedi 26 novembre, des pluies torrentielles se sont abattues sur l’île d’Ischia, située à moins de 30 km de Naples. Elles ont provoqué un gigantesque glissement de terrain dans lequel huit personnes ont trouvé la mort, quatre autres étant portées disparues.

Au milieu des décombres et des vies dévastées, les politiciens alternent larmes de crocodile et tentatives de rejeter la faute sur le voisin.

Car la catastrophe « naturelle » porte mal son nom. Certes, le risque hydrogéologique est particulièrement élevé, à Ischia en particulier et en Italie en général, du fait du relief, de la géologie et du débit élevé des torrents. Certes, le changement climatique entraîne des événements extrêmes qui aggravent les risques. Certes, les précédentes catastrophes, dont le tremblement de terre de 2017, ne sont pas le fait de l’État et de ses dirigeants.

Mais les risques étaient connus : l’ancien maire du village a même, au fil des ans, envoyé 23 courriels, restés sans réponse, à toutes les autorités imaginables, pour réclamer l’évacuation des habitants des zonesdangereuses. Son dernier mail datait de quatre jours avant le drame. Les risques étaient aussi connus à Senigallia, petite ville de la région des Marches, où des inondations ont fait onze morts le 15 septembre dernier. En 2014, la même zone avait déjà connu une catastrophe similaire, qui avait fait vingt morts.

Les responsables politiques pointent du doigt les « constructions abusives », construites à la va-vite et parfois sans moyens, mais surtout sans permis, sur des terrains souvent non constructibles. Au fil des ans, des habitants peu fortunés ont construit ces maisons, qu’ils habitent ou qu’ils louent aux touristes l’été. Elles se sont multipliées avec l’arrivée de nouveaux habitants après le tremblement de terre de 2017. Chassés de logements détruits ou inhabitables, ils se sont retrouvés dans un nouveau piège.

Les constructions abusives sont donc le clou sur lequel tapent les ministres du très réactionnaire gouvernement de Giorgia Meloni. Le ministre de l’Environnement, un proche du roi du béton et des magouilles, Berlusconi, propose – sans rire ! – de mettre en prison tous les maires qui ne combattraient pas les constructions abusives. Du nord au sud, des centaines de communes, de zones et de régions sont exposées à des risques importants. Ces endroits sont cartographiés et, depuis 2017, le plan « Italie sûre », doté de trois milliards, est censé permettre de réaliser des chantiers pour drainer les canaux de dégagement des lits des rivières, bouchés depuis des années, construire des bassins de rétention, etc.

Pour l’heure, ces projets n’ont pas dépassé le stade de l’étude ou du « projet définitif ». Et, quelles que soient les réalisations qui puissent en sortir un jour, elles ne changeront pas les réalités économiques qui poussent les habitants les moins fortunés à vivre dans des zones dangereuses et qui font que, même dans l’un des pays les plus riches de la planète, on peut mourir à cause de la pluie.

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