Leur société

Ignominies gouvernementales et politiciennes

Le 17 novembre, le ministre de l’Intérieur, Darmanin, a envoyé aux préfets une circulaire concernant les OQTF (Obligation de quitter le territoire français) qui sont infligées aux migrants dont la demande de titre de séjour a été refusée.

Ignominies gouvernementales et politiciennes

Les préfets, chargés de l’application, devront traiter tous les étrangers sous OQTF comme des étrangers délinquants, prononcer des OQTF pour chaque étranger contrôlé en situation irrégulière, systématiser les reconduites à la frontière, les traquer dans les hébergements publics, en demandant aux logeurs de les dénoncer, en allant les chercher à leur domicile. Les places en centre de rétention administrative (CRA) devront être doublées et des assignations à résidence prononcées systématiquement en cas de délai de reconduite.

Le gouvernement entretient de façon éhontée la confusion entre délinquance et immigration, faisant des CRA de véritables prisons. Son porte-parole, Olivier Véran, prétend qu’en majorité leurs pensionnaires « sont des gens qui ont commis des délits ». Les droits des migrants sont déjà piétinés : les personnes « régulières » deviennent « irrégulières » et perdent leurs droits sociaux, faute d’obtenir même un rendez-vous à la préfecture.

En durcissant encore sa politique de traque des réfugiés, le gouvernement chasse sur les terres de Le Pen. Cela n’empêche pas les politiciens rivalisant avec l’extrême droite d’accuser Darmanin de laxisme pour son projet de loi sur l’immigration annoncé pour début 2023 et pour son idée de créer un titre de séjour pour les métiers en tension, afin de satisfaire les patrons qui se lamentent sur la pénurie de main-d’œuvre dans leur secteur.

Pierre-Henri Dumont, député LR dans les Hauts de France, a accusé le gouvernement de vouloir « massivement régulariser des clandestins qui travaillent dans les métiers en tension », en les opposant aux cinq millions de chômeurs du pays. Ce jeune loup aux dents longues ne se préoccupe des chômeurs que pour les opposer aux migrants. Dans cette région du Nord depuis longtemps gravement frappée par le chômage, il s’est fait connaître durant la campagne électorale de 2017 par sa propagande réactionnaire, affichant « Zéro immigration », et doublant le RN sur sa droite.

Ce député LR est en concurrence avec la maire de Calais, Natacha Bouchard, ralliée au parti de Macron et qui mène sur la ville une politique révoltante contre les migrants, en accord avec le préfet. Elle tient quelques propos humanitaires en versant des larmes de crocodile sur leur drame, mais sa seule préoccupation est de préserver l’image touristique de la ville en les faisant disparaître du paysage. Elle approuve le harcèlement quotidien des réfugiés par la police, les démantèlements réguliers de leurs abris précaires.

Dernièrement, les bénévoles aidant les migrants ont célébré une victoire de la solidarité, à la fois contre Natacha Bouchard et contre la préfecture : en effet la justice a annulé des arrêtés préfectoraux visant à entraver leur travail, comme l’interdiction de distribuer repas et boissons aux migrants dans le centre de Calais. Cette décision de justice n’a pas pour autant réduit l’acharnement de la maire : les rochers qui ont été disposés sur les pelouses, afin d’empêcher les réfugiés d’y poser leurs duvets et leurs tentes, sont toujours là. Et l’urgence pour les bénévoles est maintenant de réussir à obtenir des hébergements pour faire face aux intempéries hivernales.

Récemment, le nombre de tentatives de traversée vers l’Angleterre par la mer a explosé. Des habitants du Calaisis ont été témoins de scènes terribles : des candidats à la traversée qui se jetaient à l’eau pour monter à bord des bateaux-taxis de passeurs qui les attendaient au large de la plage.

Face à cette situation, les gouvernements français et anglais ont conclu un nouvel accord scandaleux : la Grande-Bretagne va financer elle-même l’augmentation du nombre de policiers sur les plages du nord de la France pour empêcher les passages. Les deux gouvernements pointent du doigt la criminalité des passeurs. Mais les vrais responsables de ces morts par milliers, ce sont eux, et leurs homologues européens, qui multiplient murs et barbelés, qui se renvoient les réfugiés comme on se renvoie la balle, qui leur refusent un accueil digne et leur interdisent ce qui devrait être le minimum : la liberté de circulation et d’installation.

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