Safran ex-Herakles – Bordeaux : procès encore repoussé16/11/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/11/2833.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Safran ex-Herakles – Bordeaux : procès encore repoussé

Neuf ans après l’accident de la poudrerie de Saint-Médard, qui avait fait un mort et deux blessés graves par brûlure, les victimes et leurs familles attendaient avec impatience le procès en correctionnelle, lundi 7 novembre à Bordeaux.

Mais le représentant de la société Safran (ex-Herakles) ne s’est pas présenté au tribunal ce jour-là.

Ses avocats ont mis en avant le fait que ce directeur, qui aurait pu être remplacé par un autre, avait été testé positif au Covid le matin même. Ils ont demandé et obtenu un report du procès au 3 avril 2023. Pour mémoire, après un non-lieu prononcé en faveur de la direction en 2018, les familles ont obtenu que la cour d’appel de Bordeaux ordonne une mise en examen pour mise en danger et faute inexcusable de l’employeur. Les familles et victimes devront maintenant attendre cinq mois de plus, les patrons sachant parfaitement utiliser les lenteurs d’une justice faite à leur mesure.

Après le drame survenu le 5 décembre 2013, l’attitude de la direction Safran avait été de nier toute responsabilité ou erreur de sa part. Pire, elle n’avait pas cessé d’invoquer une défaillance humaine, laissant entendre une possible responsabilité des ouvriers qui n’auraient pas respecté les consignes de sécurité. Pourtant, l’enquête du CHSCT et les rapports de l’inspecteur du travail avaient révélé plusieurs manquements graves à la sécurité. C’était par exemple le fait d’imposer aux trois ouvriers de réaliser manuellement le démoulage de 470 kilogrammes de poudre de propergol solide, alors que l’outillage qui aurait permis de réaliser cette opération en automatique n’était pas opérationnel. Lors du démoulage, un arc d’électricité statique est apparu et a provoqué un feu de poudre. En quelques secondes la température est montée à 4000°C dans l’enceinte du bâtiment. Un des trois ouvriers, qui n’a pas eu le temps de sortir, est décédé des suites de ses brûlures. Les deux autres ont réussi à sortir du bâtiment mais ont gardé de profondes séquelles physiques et psychologiques, sans parler des nombreux séjours à l’hôpital pour les greffes.

À l’époque, la direction Safran avait exercé une pression telle dans ses usines de Gironde qu’aucun syndicat n’avait osé dénoncer ou même parler de cette affaire. ArianeGroup, qui regroupe maintenant les activités spatiales d’Airbus et Safran, y compris le site de Saint-Médard, est plus préoccupé, comme son prédécesseur, de baisser les effectifs que de s’occuper des aspects humains. Aujourd’hui, les victimes et leurs proches sont encore traumatisés. Ils n’ont bénéficié d’aucun suivi ou accompagnement. Les deux ouvriers sont abandonnés à leur sort et ArianeGroup ne fait pas le moindre effort pour les aider à trouver un emploi adapté dans l’une de ses nombreuses usines en Gironde. Quelles que soient les directions qui se succèdent, le cynisme et le mépris patronal restent les mêmes.

Partager