Russie-Ukraine : une guerre qui “semble devoir durer”25/08/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/08/2821.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Russie-Ukraine : une guerre qui “semble devoir durer”

Cela fait six mois que le président russe, Poutine, a lancé son armée sur l’Ukraine. « Une guerre qui dure et qui semble devoir durer », a déclaré le Haut représentant de l’Union européenne (UE) pour la politique étrangère, Josep Borell, le 22 août.

Et si certains s’imaginent que l’UE cherche à promouvoir la paix dans l’Est du continent, ils en seront pour leurs frais : Borell a ajouté que l’UE veut mettre sur pied une « mission d’entraînement et d’assistance » à l’armée ukrainienne dans des bases militaires de pays voisins.

On a là un exemple de la façon dont l’Europe et l’Amérique, qui arment l’Ukraine depuis des années, cherchent à impliquer dans ce conflit d’autres pays que les deux belligérants. Et, six mois après le déclenchement de l’«opération militaire spéciale » de Poutine, le 24 février, afin, prétendait-il, de « dénazifier l’Ukraine », on a là un affrontement qui dépasse largement les confins russo-ukrainiens. Il oppose en effet le bloc militaire des puissances impérialistes occidentales, cette OTAN créée par les États-Unis en 1949, et la Russie, dont l’Occident veut encore réduire la zone d’influence.

Dans le cadre de ce qu’elles conçoivent comme une guerre d’usure, ces grandes puissances trouvent comme souvent plus profitable de faire défendre leurs intérêts par d’autres. Dans le cas présent, elles s’abritent derrière la population ukrainienne, promue chair à canon, victime des bombardements et ravages de la guerre, et finalement d’enjeux qui la dépassent.

Mais il ne faudrait pas oublier une autre victime de cette guerre, la population russe. Car elle paie d’un prix social, politique et humain énorme d’avoir été entraînée malgré elle par le chef du Kremlin dans un affrontement fratricide avec une population ukrainienne à laquelle l’unissent des siècles d’histoire commune.

Poutine et son homologue ukrainien Zelensky sont présentés par les médias et gouvernants occidentaux en défenseurs de camps, sinon de valeurs, opposés.

Zelensky n’a certes pas à forcer le trait quand il décrit un Poutine qui piétine sans pitié les libertés en Russie et les hommes en Ukraine. Mais il se garde de rappeler qu’il a, tout comme Poutine, saisi l’occasion de la guerre pour museler toute forme d’opposition, pour abolir – ce à quoi il n’était pas parvenu en temps de paix – la législation sociale et pour soumettre de fait les travailleurs à la loi martiale. Zelensky, qui aime parader devant les micros et les caméras, garde un silence pudique, mais bien explicable, sur les requins russes du monde des affaires, pourtant visés par les sanctions occidentales en tant que complices de Poutine. En fait Zelinsky ne dit rien des oligarques de Poutine, pour ne pas avoir à évoquer les liens de ces derniers avec ses propres oligarques : ceux qui l’ont fait élire, ceux qui font la loi depuis trente ans en Ukraine, ceux qui pillent l’économie du pays et qui financent des milices à leur solde, souvent d’extrême droite. Et puis, beaucoup sont allés se mettre à l’abri dans leurs somptueuses propriétés en Occident, en oubliant la « défense de la patrie ». Ou plutôt, en la laissant aux bons soins des petits, au risque de leur peau.

Sur ce terrain, côté russe ou côté ukrainien, les politiques et les états-majors sont sur la même longueur d’onde. Les bombardements des villes ukrainiennes, comme ceux, par l’armée de Zelensky, du Donbass séparatiste et des régions conquises par la Russie, ont frappé des zones d’habitation populaires, des usines, mais jamais les beaux quartiers. Alors que Poutine faisait pilonner la capitale ukrainienne, le Kremlin a fait remarquer qu’il épargnait la Rada (le Parlement) et le siège du pouvoir. Réciprocité des égards dus aux dirigeants et aux nantis, les forces de Kiev, qui se targuent d’avoir su détruire l’état-major de la marine et d’autres objectifs militaires russes en Crimée, semblent ignorer une cible symbolique très visible : l’immense palais que Poutine s’est fait construire au bord de la mer Noire.

Il en va tout autrement quand les militaires russes et ukrainiens installent leurs batteries dans une école, ou un poste de commandement dans un hôpital, des foyers de jeunes travailleurs – deux d’entre eux ont été pulvérisés à Kharkiv le 22 août – ou dans la plus grande centrale nucléaire d’Europe, à Zaporijjia, quitte à risquer une catastrophe pire que celle de Tchernobyl. Les deux camps se font un bouclier de la population et, lorsqu’un missile la frappe, ils recyclent morts et blessés dans leur propagande, creusant ainsi toujours plus le fossé de sang et de nationalisme entre les populations et les travailleurs des deux peuples.

Cette guerre offre un terrain propice aux cliques au pouvoir à Moscou et à Kiev pour enrégimenter leur peuple. Dans les pays occidentaux, elle est mise au service de la propagande des États dans un but similaire.

Alors que la crise de l’économie capitaliste s’aggrave, les États occidentaux se préparent à des conflits de plus grande ampleur. Dirigeants et gradés de haut rang le disent désormais de plus en plus fort et entendent en profiter pour habituer leurs classes populaires à marcher au pas.

En attendant, et l’on vient de le revérifier au fil des commentaires sur ces premiers mois de guerre, la propagande des médias et des gouvernants ne se prive pas de rejeter sur ce conflit les hausses des prix de l’énergie, des céréales, etc. Cet « argument » a été martelé, au mépris de la vérité. En effet ces hausses ont débuté bien avant l’invasion de l’Ukraine, et ce simple rappel des faits montre quels en sont les véritables coupables. Ce sont les capitalistes d’ici, des autres pays développés d’Occident, qui ont fait et font flamber les prix, afin de maintenir et d’augmenter leurs profits sur le dos des populations.

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