Leur société

Demeter : gendarmerie privatisée

Les ministres de l’Intérieur et de l’Agriculture ont fait appel de la décision du tribunal administratif de Paris leur enjoignant de dissoudre Demeter, cette cellule de gendarmerie dédiée à la protection des agriculteurs.

S’il s’agissait, comme le prétendent aujourd’hui les ministres, de protéger les agriculteurs des vols de gasoil, d’engins, de bêtes ou des atteintes à la propriété, nul besoin de cellule spéciale. En 2019, la création de Demeter, sous les auspices du ministre Castaner, répondait en fait à un objectif politique. Le gouvernement voulait gagner le soutien de la FNSEA, le syndicat agricole majoritaire dominé par les capitalistes du secteur. Il a donc épousé ses querelles et mit la gendarmerie à sa disposition.

Demeter devait, et c’était indiqué en toutes lettres dans l’ordre ministériel, prévenir et réprimer les « actions de nature idéologique, y compris symboliques » s’en prenant à l’agriculture. Pour ce faire, les gendarmes devaient collaborer étroitement avec la FNSEA, et elle seule, pour repérer, suivre et éventuellement interpeller les contrevenants que les gros agriculteurs lui désigneraient.

Des militants proposant des débats sur les pesticides ont ainsi été interrogés et leur domicile perquisitionné, le matériel de journalistes a été saisi et eux-mêmes ont été menacés, des gendarmes sont intervenus dans des lycées agricoles pour expliquer aux élèves les vertus de l’agriculture selon la FNSEA, la liberté d’expression a été bafouée à chaque demande des barons du blé, de la betterave ou du poulet. Face aux contestataires, quoi qu’on pense de leurs actions, les gendarmes ont agi comme le bras armé de la coterie des capitalistes de l’agriculture et de leurs préjugés les plus étroits.

Le tribunal administratif a donc rappelé au gouvernement que, si l’État et ses gendarmes sont bien au service de la propriété, le rôle des responsables politiques est de faire en sorte que cela ne se voie pas, ou du moins pas trop.

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