Afghanistan : catastrophe humanitaire26/01/20222022Journal/medias/journalnumero/images/2022/01/2791.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Afghanistan : catastrophe humanitaire

Le 24 janvier, une délégation de talibans conduite par le ministre des Affaires étrangères, Amir Khan Muttaqi, a rencontré à Oslo les représentants des États-Unis, de la France, du Royaume-Uni, de l’Allemagne, de l’Italie, de l’Union européenne et de la Norvège.

« Tout en cherchant à résoudre la crise humanitaire (…), nous poursuivrons une diplomatie lucide avec les talibans [dictée par] notre intérêt constant pour un Afghanistan stable, respectueux des droits et inclusif », avait tweeté la veille le représentant américain pour l’Afghanistan, Thomas West. De cette déclaration tout à fait hypocrite ressort au moins une vérité : les dirigeants américains s’inquiètent surtout de la menace que la catastrophe humanitaire fait peser sur la stabilité du pays et de toute la région.

La situation en Afghanistan s’aggrave en effet de jour en jour. Vingt-trois millions d’Afghans, soit 55 % de la population, sont menacés par la famine. Le chômage a explosé et les salaires des fonctionnaires ne sont plus payés depuis des mois. Dans les rues de Kaboul, les femmes et les enfants sont de plus en plus nombreux à mendier. La situation dans les campagnes est tout aussi dramatique.

À cette misère s’ajoute le poids de la dictature. Ainsi les femmes qui, dans les villes, avaient gagné quelques droits sous le précédent gouvernement, se voient exclues des emplois publics. Elles ne peuvent faire de longs trajets sans être accompagnées par un homme de leur famille. Les écoles secondaires pour filles restent pour la plupart fermées. Des militantes féministes afghanes qui manifestent régulièrement à Kaboul et dans d’autres villes sont arrêtées, sans que leurs proches puissent savoir par la suite ce qu’elles deviennent. Le journal Le Monde du 23 janvier rapportait l’arrestation le 19 janvier de deux jeunes Afghanes qui avaient participé avec une vingtaine d’autres à une manifestation, à Kaboul, pour protester contre le meurtre et la disparition de femmes depuis la prise du pouvoir par les talibans, ainsi que contre les tentatives de ces derniers de rendre obligatoire la burqa. Beaucoup de membres de l’ethnie hazara, persécutée car d’obédience chiite, jugée hérétique par les talibans, ou encore d’anciens membres du pouvoir déchu, ont dû fuir. Deux mille Afghans auraient ainsi franchi illégalement la frontière de l’Iran, pays limitrophe.

Les puissances occidentales déclarent conditionner l’aide internationale au respect des droits humains par les talibans. Mais elles n’en ont jamais fait grand cas. Les États-Unis ont même soutenu le premier pouvoir taliban de 1996 jusqu’en 2001. Après les attentats du 11 septembre 2001, les anciens amis sont devenus les ennemis à abattre, accusés de protéger Ben Laden. La guerre a été déclenchée et une pluie de bombes a été déversée sur le peuple afghan. Vingt ans plus tard, en août 2021, les États-Unis ont décidé de partir, abandonnant le gouvernement fantoche qu’ils avaient mis en place, laissant le pays qu’ils ont contribué à détruire aux mains des talibans, une clique réactionnaire que toute leur politique a aussi contribué à renforcer.

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