Dans les entreprises

Sepur : des déchets et des ordures

Un racket de leurs subordonnés : c’est ce que des chefs d’équipe de Sepur, entreprise de collecte de déchets, imposaient à des travailleurs en profitant de leur stigmatisation par l’État en tant que sans-papiers.

Fin octobre, à l’aide de militants CGT d’Ile-de-France, des travailleurs sans-papiers faisaient grève pour leur régularisation. Sur les 200 grévistes, une soixantaine travaillaient pour la Sepur, beaucoup en intérim. La lutte obligea des entreprises à fournir à leurs employés les documents exigés par les préfectures pour entamer les procédures de régularisation.

Cette grève mit aussi à jour le chantage exercé par deux chefs de Sepur, au dépôt de Villejust, dans l’Essonne : sachant qu’un travailleur était sans-papiers ou utilisait l’identité d’une connaissance, ils exigeaient ordinairement 200 euros en liquide par mois qu’ils se partageaient. Huit éboueurs maliens et mauritaniens ont depuis porté plainte pour ne plus être soumis à ce racket exercé particulièrement sur les intérimaires qui avaient absolument besoin que leur contrat soit renouvelé. Ils devaient ainsi abandonner des sommes importantes à ces chefs sur des payes n’excédant pas 1 500 euros par mois.

La Sepur, entreprise importante ayant 250 contrats avec des collectivités regroupant 7 millions d’habitants et employant 2 500 salariés, a déclaré avoir ouvert une enquête interne et assuré qu’elle « condamnera avec la plus grande sévérité ces pratiques intolérables si elles venaient à être avérées ». Or, les abus envers les intérimaires y sont courants : déjà en janvier 2021, la Sepur a été condamnée à verser 14 000 euros à un éboueur marocain à qui elle avait imposé 164 missions d’intérim en deux ans et demi, évoquant fallacieusement un surcroît temporaire d’activité.

En 2017, la Sepur avait carrément traîné au tribunal une inspectrice du travail pour « tentative de chantage » : son crime était d’avoir fait son travail en essayant d’imposer la réintégration d’un salarié protégé, licencié abusivement.

Devant le scandale du racket des éboueurs, le ministère de l’Intérieur a dû gronder ce patron : « Il y a des conditions de travail qui frisent l’exploitation. Il y aura des conséquences pour les employeurs, des sanctions administratives, des poursuites judiciaires », a-t-il déclaré. De l’exploitation, c’est certain. Quant à la sévérité des autorités envers une entreprise importante qui entretient des relations d’affaires avec de nombreuses autorités locales, cela reste à voir.

De leur côté, les travailleurs qui ont fait grève pour obtenir leurs papiers et qui ont dénoncé le racket, savent qu’ils doivent compter d’abord sur eux-mêmes et sur leur solidarité pour faire respecter leurs droits.

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