Nouvelle-Calédonie : la situation coloniale demeure15/12/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/12/2785.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Nouvelle-Calédonie : la situation coloniale demeure

Si Macron s’est félicité de la victoire du non à l’indépendance dimanche 12 décembre, le scrutin a surtout été marqué par une abstention de 56 %, démontrant que l’appel à l’abstention des indépendantistes kanak a été largement suivi par leur communauté.

Malgré les demandes de report du référendum par les Kanak, pour cause de pandémie et de deuil dans les familles, le gouvernement a voulu en maintenir la date, pressé qu’il était d’en finir avec ces scrutins et escomptant une victoire du non. Il entérine donc le rejet de l’indépendance sans que les principaux concernés ne se soient exprimés. Dans la province des Îles, où ne vivent que des Kanak, la participation a été de 4 % et dans celle du Nord, elle a été de 16 %. Elle n’a été élevée, à 60 %, que dans la province Sud, celle de Nouméa « la Blanche », en majorité peuplée par les Caldoches, descendants des colons, et par ceux qui sont plus récemment venus de métropole, où le non à l’indépendance a fait presque autant de voix qu’en octobre dernier lors du deuxième référendum.

Cette profonde division entre communautés est en Nouvelle-Calédonie l’héritage de 168 ans de domination coloniale. Sur ces terres, c’est la bourgeoisie française et caldoche, habitant essentiellement dans le Sud, qui s’approprie l’essentiel des richesses, réservant aux travailleurs chômage et bas salaires, encore plus quand ils sont kanak ou des îles voisines du Pacifique. Ainsi, 20 % des 270 000 habitants vivent sous le seuil de pauvreté, parmi lesquels 70 % sont kanak, une fracture qui est allée en s’aggravant ces dernières années. En 2020, 3 000 travailleurs, pour beaucoup des jeunes et des Kanak, ont perdu leur emploi, faisant monter la proportion officielle de chômeurs à plus de 13 %, dont sept sur dix sont kanak. Et pour ceux qui ont un travail, la vie est dure. Le salaire minimum est plus de 20 % inférieur à celui de France alors que les prix sont plus élevés de 33 %, et jusqu’à 73 % pour l’alimentaire.

Aussi, quand Macron a déclaré dimanche 12 décembre que « ce soir, la France est plus belle car la Nouvelle-Calédonie a décidé d’y rester », il a réagi à la fois en responsable de l’impérialisme français, satisfait de pouvoir réaffirmer sans difficulté sa présence dans cette région du monde, et en politicien, content d’afficher une victoire. Et quand il a dit que « la majorité des Calédoniennes et Calédoniens ont choisi de rester français », « librement », ignorant délibérément les Kanak, il a affiché son mépris à la fois social et colonial.

Dans les mois qui viennent, l’État français va engager avec les partis nationalistes kanak et les partis loyalistes caldoches des pourparlers sur l’avenir des institutions de l’archipel.

Ces discussions ne changeront en rien la domination de la bourgeoisie française et caldoche en Nouvelle-Calédonie, mais occuperont nombre de politiciens de toutes les communautés.

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