Logement : et pourquoi pas la réquisition des demeures de luxe ?20/10/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/10/2777.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Logement : et pourquoi pas la réquisition des demeures de luxe ?

La ministre déléguée au Logement, Emmanuelle Wargon, a suscité bien des réactions en déclarant, jeudi 14 octobre : « Les pavillons avec jardin, ce rêve construit pour les Français dans les années 1970, ce modèle d’urbanisation qui dépend de la voiture pour les relier, est un non-sens écologique, économique et social. »

Devant le tollé provoqué, la ministre a regretté « la caricature faite de ses propos ». Mais le mépris social qu’ils traduisent est bien réel. Bien sûr, couvrir le pays de maisons individuelles, disperser les dizaines de millions d’habitants des villes sur les campagnes aurait un côté aberrant. Mais, avec cette saillie, la ministre visait les nombreux salariés ou retraités qui essayent de fuir les conditions de vie et de logement réservées dans les villes aux milieux populaires : logements à prix prohibitifs, familles entières contraintes de vivre dans quelques dizaines de mètres carrés. Les logements sociaux, pour ceux qui arrivent à les décrocher, sont bien souvent mal entretenus, quand ils ne sont pas laissés à l’abandon, dans des quartiers où tout se dégrade, avec des services publics devenus presque inexistants. On ne peut que comprendre ceux qui, au prix de lourds sacrifices, essayent de vivre ailleurs.

Mais s’il y a bien une aberration, « un non-sens écologique, économique et social », c’est le mode de vie des classes riches, pour lesquelles la ministre et tous ses semblables ont la plus grande déférence. On trouve dans la région parisienne et toutes les grandes villes des hôtels particuliers de plus de mille mètres carrés, avec des parcs entiers à disposition pour n’abriter parfois qu’un seul individu. Les grands capitalistes, leurs familles et leurs protégés, possèdent de multiples propriétés, souvent immenses, qu’ils n’occupent que quelques jours par an, et pas toujours. Ces riches propriétaires peuvent bénéficier de multiples dérogations pour faire construire, en empiétant sur le domaine public, des hectares entiers sur des « sites protégés ». Les immeubles collectifs des quartiers riches du 16e arrondissement ou de Neuilly sont construits eux-mêmes avec des matériaux nobles. Bien isolés, spacieux, ils peuvent tenir plus de cent ans.

S’il y a bien un gaspillage indécent de mètres carrés habitables, il est à rechercher de ce côté-là. Ce n’est certainement pas à ceux-là que pense Emmanuelle Wargon.

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