Leur société

États généraux de la justice : une mise en scène de plus

Des états généraux de la justice, prévus pour durer cinq mois, se sont ouverts lundi 18 octobre. Le ministre Dupond-Moretti dit qu’il veut ainsi donner la parole aux professionnels du haut en bas de la pyramide judiciaire, jusqu’aux surveillants de prison et aux simples citoyens.

Macron se défend d’être l’initiateur de cette nouvelle consultation puisqu’elle avait été réclamée par les deux plus hauts magistrats de France, inquiets des « mises en cause systématiques de la justice », critiquée pour sa lenteur et accusée de laxisme par des syndicats de police et des responsables politiques.

Il n’empêche, Macron ne pouvait que se saisir de l’occasion pour à nouveau mettre en scène sa prétendue proximité avec les préoccupations de l’homme de la rue et les « grands enjeux de société » à quelques mois du premier tour de la présidentielle. Après le « grand » débat pour éteindre le mouvement des gilets jaunes, puis le Ségur de la santé, le Grenelle de l’éducation, ou le Beauvau de la sécurité, ces états généraux sont un événement de plus organisé pour donner l’illusion d’un changement et de mesures capitales qu’orchestrerait Macron après avoir « écouté » les personnes concernées.

Le système judiciaire n’a pourtant pas besoin de cinq mois pour évaluer ce qui ne va pas : la dernière réforme en date, imposée en 2018 sous Macron, avait soulevé contre elle une large partie des avocats. Les gouvernements ont réduit les moyens alloués à la justice de proximité, celle qui, pour les plaignants ou les accusés, concerne la vie quotidienne, jusqu’aux affaires familiales. Comme les hôpitaux, La Poste ou l’Éducation nationale, les moyens déployés sont de plus en plus rognés. Les chambres spécialisées en droit immobilier ou bancaire ont plus de deux ans de dossiers à traiter, auxquels il faut ajouter trois ou quatre ans pour un appel.

Quant aux prisons, le constat de leur surpopulation est devenu une banalité. Le nombre de peines de prison effectivement accomplies a doublé en vingt ans et elles se sont allongées. Contrairement à ce que la droite et l’extrême droite ne cessent de claironner, la justice n’est pas de plus en plus laxiste. Les chiffres prouvent l’inverse : en 1995, pour 100 000 habitants, 91 personnes étaient sous les verrous, en 2020, elles étaient 124.

Ces dernières années, les rapports sur les dysfonctionnements de la justice se sont empilés sans que rien ne change. Outre son personnel, ce sont les plus petits justiciables qui en subissent les conséquences. Elle reste ainsi une machine dont les rouages ne servent pas à aider les petites gens. Quand ceux qui en auraient besoin tombent entre ses mains, ils doivent plutôt s’attendre à être broyés.

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