Dans le monde

États-Unis : céréales enrichies et salariés appauvris

Depuis le 5 octobre, 1 400 employés de Kellogg’s, le fabricant de céréales de petit déjeuner, sont en grève dans quatre usines américaines. Ils rejettent les reculs sociaux importants inclus dans le contrat de travail que la direction veut leur imposer.

En 2015, sous la menace d’une délocalisation de la production vers le Mexique, leur syndicat avait accepté que les nouveaux embauchés soient payés 13 dollars de l’heure de moins que les autres salariés. Aujourd’hui la direction exige que les salaires et avantages sociaux de tous les travailleurs soient alignés par le bas.

Au contraire les grévistes refusent que le patron économise sur les ajustements de salaire qui compensent un peu l’inflation – plus de 5 % sur l’année écoulée –, sur leur assurance-santé, sur la rémunération de leurs congés payés, sur le montant de la future retraite. Ils refusent aussi la suppression de jours de congés.

Pourquoi l’accepteraient- ils ? Le PDG et les cadres dirigeants ont vu leur rémunération augmenter de 20 %. Kellogg’s a passé la pandémie sans que ses bénéfices en souffrent. Mais les banques et fonds d’investissement qui sont actionnaires de ce géant de l’agroalimentaire en veulent tout simplement toujours plus.

Pour discréditer la grève, la direction s’est répandue dans les médias sur sa supposée générosité en affirmant que ses ouvriers touchaient des salaires importants, jusqu’à 120 000 dollars en un an. Mais le PDG, qui gagne 11,6 millions par an, s’est beaucoup moins étendu sur le nombre impressionnant d’heures supplémentaires obligatoires qu’il impose, et qui explique cela.

Avant la crise sanitaire, des licenciements avaient tellement réduit les effectifs que les journées de douze heures étaient courantes. « Normalement je travaille de 7 heures à 15 heures. À 14 h 59, les chefs me disaient de rester jusqu’à 19 heures ; et à 18 h 59, qu’il fallait que je revienne le lendemain à 3 heures du matin » a témoigné un ouvrier. Avec la pandémie et l’augmentation des achats de céréales des familles restant à domicile, il fallait travailler sept jours sur sept, et parfois jusqu’à seize heures par jour.

Depuis cet été, plusieurs grèves ont éclaté dans l’agro­alimentaire, pour des raisons similaires. En juillet les ouvriers de Frito-Lay, leader mondial des chips et propriété de PepsiCo, en août ceux de Nabisco, qui produisent les biscuits Oreo et Ritz pour le compte de Mondelez, et récemment ceux d’El Milagro, qui fabriquent des tortillas, se sont battus notamment contre les horaires de travail à rallonge. Ils ont réussi à repousser certaines des plus vives attaques patronales.

Face à un patronat qui voudrait imposer des conditions de travail et de salaire dégradées, ces grèves sont déjà un caillou dans sa chaussure.

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