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Israël : l’extrême droite au pouvoir, avec ou sans Netanyahou

Une alliance hétéroclite, formée le 2 juin par deux partis de gauche, deux du centre, trois de droite et d’extrême droite, rejoints par le parti arabe israélien islamiste Raam, pourrait parvenir à constituer un gouvernement en Israël, obligeant ainsi Benyamin Netanyahou à quitter le poste de Premier ministre, qu’il occupe depuis douze ans sans interruption.

Du côté de la gauche, les travaillistes s’inscrivent dans la continuité de leurs participations précédentes à des gouvernements d’union nationale avec la droite. Situé à gauche des travaillistes, le parti Meretz a justifié son ralliement à une telle coalition au nom de la nécessité d’évincer Netanyahou. C’est en effet le seul objectif commun à ces partis qui prétendent faire voter rapidement une loi interdisant à toute personne inculpée dans une procédure judiciaire d’occuper le poste de Premier ministre. Jugé pour fraude, corruption et abus de pouvoir, Netanyahou se verrait ainsi fermer les portes du gouvernement.

Le vote de confiance devant la Knesset, le Parlement israélien, a été fixé au dimanche 13 juin. La coalition ne disposant que d’une très faible majorité, estimée à 61 députés sur 120, Netanyahou a multiplié les déclarations menaçantes à l’égard des élus qui voteraient contre lui, appelant ses partisans à manifester devant leurs domiciles. Lancé dans une surenchère vis-à-vis de l’extrême droite, il a apporté son soutien à la « marche des drapeaux », appelée jeudi 10 juin par les mouvements sionistes pro-colons pour célébrer la conquête de Jérusalem en 1967. Comme elle n’a pas été autorisée, contrairement aux années précédentes, à traverser les quartiers arabes de la partie orientale de la ville, les organisateurs ont préféré annuler leur défilé. Netanyahou et plusieurs membres de son parti, le Likoud, ont déclaré, eux, qu’ils manifesteraient, quelles que soient les conséquences, le Hamas ayant menacé d’une nouvelle escalade si la marche était maintenue.

Dans ce climat de tension alimenté par les partisans de Netanyahou, le résultat du vote du 13 juin n’était pas encore assuré. Mais, même si cette prétendue « coalition du changement » parvenait à mettre fin à l’ère Netanyahou, ce serait pour continuer sa politique. En effet celui qui lui succéderait comme Premier ministre, Natali Benett, est le dirigeant du parti d’extrême droite Yamina (Vers la droite), qui ne dispose pourtant que de sept députés à la Knesset. Loin d’être un nouveau venu, il a enchaîné les portefeuilles dans les gouvernements successifs de Netanyahou, à l’Économie et à la Défense, avant de passer dans l’opposition à la suite des élections de mars 2020. Appartenant au courant sioniste religieux d’extrême droite, il prône la colonisation des territoires palestiniens occupés et s’oppose à toute forme d’État palestinien sur des terres revendiquées au nom de la Bible. Quant au parti arabe israélien islamiste Raam, il avait commencé dans un premier temps par négocier avec Netanyahou, avant finalement de conclure un accord avec le camp opposé, cherchant à monnayer son ralliement au plus offrant.

Autant dire que les Palestiniens n’ont vraiment rien à attendre de cette coalition. Les services de police viennent de lancer une campagne d’arrestations massives, baptisée Loi et ordre, ciblant en particulier les jeunes Arabes israéliens dont la mobilisation a été importante ces dernières semaines. Ces arrestations se sont bien souvent accompagnées d’insultes, d’humiliations et de violences physiques. Avec ou sans Netanyahou, cette répression risque de se poursuivre car c’est la seule réponse que les dirigeants israéliens connaissent depuis soixante-dix ans face à la lutte des Palestiniens pour faire reconnaître leurs droits.

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