Colombie : une révolte qui ne faiblit pas02/06/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/06/2757.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Colombie : une révolte qui ne faiblit pas

Depuis le 28 avril, les journées de manifestations et de grèves se succèdent en Colombie, face à la hausse de la pauvreté et contre les menaces du président Ivan Duque et la violence de la répression contre les manifestants.

Même les décomptes officiels font état de près de soixante morts, de milliers de blessés et de centaines de disparus. Le gouvernement a mis le feu aux poudres avec un projet de réforme fiscale prévoyant une hausse de la TVA sur les produits de base et un fort élargissement de l’assiette de l’impôt pour les travailleurs pauvres. Face à l’ampleur de la mobilisation dans le pays, le pouvoir a rapidement fait marche arrière et le ministre des Finances a dû démissionner.

Depuis, la contestation n’a pas cessé. La violence de la répression policière, l’augmentation de la pauvreté, qui touche près de la moitié des 50 millions de Colombiens, soulèvent l’indignation.

Les manifestants, qui ont aussi obtenu l’abandon d’une attaque contre le système de santé, réclament des mesures contre la pauvreté, la gratuité des études supérieures, l’amélioration des services publics et une réduction des inégalités. Ils organisent des barrages routiers dans diverses zones du pays, et les manifestations de la journée se prolongent le soir et la nuit par des affrontements avec les forces de répression.

En réponse, le régime traite les contestataires de terroristes, les accusent de mettre en péril la lutte contre l’épidémie et d’avoir des liens avec les narcotrafiquants. Cette dernière accusation est d’autant plus mensongère qu’à Cali les gros bras des narcos prêtent main-forte à la police contre les manifestants.

Le président Duque n’est pas face à sa première vague de manifestations. Des mobilisations massives avaient eu lieu en 2019 puis en 2020 pour dénoncer des privatisations, la remise en cause du droit du travail et les assassinats perpétrés par les nervis de l’État, des possédants ou des narcos. L’ONG colombienne Indepaz a recensé plus d’un millier de militants assassinés depuis 2016, date de la signature de la paix entre le gouvernement et la guérilla des FARC. Et Duque n’a rien fait pour aider à la réinsertion des ex-guérilleros dans la société civile.

Le 28 mai, il a annoncé qu’il déployait l’armée dans la région de Cali, la troisième ville du pays, qui compte plus de 2 millions d’habitants, où un enquêteur judiciaire a été lynché parce qu’il venait de tuer deux manifestants. Duque dit qu’il ne fera plus de concession tant que les barrages routiers n’auront pas été levés et que les organisations mobilisées, en tête les directions syndicales et l’opposition, n’auront pas clairement condamné la résistance des manifestants.

En réponse, une nouvelle journée de manifestations et de grève nationale a été appelée pour mercredi 2 juin. Le gouvernement invite ce qu’il appelle cyniquement « l’assistance militaire » et les autorités locales à rétablir l’ordre par tous les moyens. Mais, face à un pouvoir qui ne connaît que la manière forte contre la population, les manifestants, dont de nombreux jeunes à qui ce régime n’offre ni moyens d’étudier ni moyens de travailler, n’ont pas l’intention de plier.

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