Réforme de l’ENA : rien à changer, tout à jeter24/02/20212021Journal/medias/journalnumero/images/2021/02/2743.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Réforme de l’ENA : rien à changer, tout à jeter

Le gouvernement a présenté jeudi 11 février sa réforme des écoles de la haute fonction publique qui forment les hauts fonctionnaires et dont fait partie l’École nationale d’administration (ENA).

Les formules clinquantes n’ont pas manqué pour cette réforme : « réparer l’ascenseur social », « assurer l’égalité des chances », « casser l’entre-soi », et même « changer qui sont les hauts fonctionnaires » ! Mais, derrière ces belles paroles, il n’y avait que des propositions creuses.

La principale mesure est la création pour la rentrée 2021 de classes « Talents » réservées à 1 000 jeunes issus de milieu populaire, pour préparer l’entrée dans les écoles de la haute fonction publique. Cette nouvelle voie représenterait seulement 15 % de places supplémentaires par rapport aux concours traditionnels externes, soit pour l’ENA six places sur quarante.

L’inégalité dans le recrutement s’accentue de plus en plus, comme à l’ENA où la proportion d’enfants d’ouvriers est passée de 5 % à 1 % entre 2006 et 2020. Face à cette situation, la nouvelle mesure est de la poudre aux yeux, d’autant plus que, dans le même temps, les conditions d’enseignement continuent à se dégrader dans les quartiers populaires.

Ce n’est évidemment pas l’éventuelle présence d’énarques venus de milieu populaire qui changera la politique antiouvrière de l’État. Le problème dépasse largement le mode de recrutement des hauts fonctionnaires. Leur connivence avec la grande bourgeoisie est renforcée par le fait qu’ils viennent très souvent du même milieu social et qu’ils ont fait les mêmes écoles. Mais elle vient surtout du fait que tout l’État est construit pour défendre les intérêts du grand patronat.

Les hauts fonctionnaires sont sélectionnés, triés et formés par la classe dominante, dès leur enfance lorsqu’ils en sont issus, dès l’école sinon. Ils apprennent à la servir, des fonctions de sous-préfet à celles de conseiller ministériel, des postes de hauts cadres à ceux de PDG dans les grandes entreprises publiques et privées, ou bien comme hauts gradés au sein de la police ou de l’armée. Dans ces conditions, les rares qui sont d’origine ouvrière ne se distinguent finalement pas des autres.

Cela ne changera pas en repeignant l’État d’une autre couleur, ni même en supprimant l’ENA, comme Macron l’évoquait en 2019 en réponse à la colère des gilets jaunes.

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