Dans le monde

ONU : droits de l’homme sélectifs

L’élection de quinze États, dont la Russie, la Chine et l’Arabie saoudite, au comité des droits de l’Homme de l’ONU a tellement l’air d’une sinistre plaisanterie que, en Occident, certains gouvernants ont affecté de s’en indigner et que les médias y ont fait écho.

Ils ont rappelé que la Russie de Poutine, quand elle ne réprime pas ses manifestants, empoisonne des opposants en vue. L’Arabie saoudite ? Son prince héritier a fait tuer et découper un journaliste dissident dans un de ses consulats. Et elle impose une législation féodalo-religieuse à son peuple, et d’abord à sa moitié féminine, tout en écrasant sous ses bombes (fournies par la France et les USA) la population du Yémen, dont la révolte déstabilise l’ordre régional voulu par les puissances impérialistes.

Mais c’est contre Pékin qu’on a le plus entendu de cris indignés, particulièrement à propos du sort qu’il fait subir aux Ouïgours du Xinjiang.

Ce peuple de langue turque et de culture arabo-musulmane, qui vit dans l’ouest de la Chine, est en butte à une oppression nationale et à une répression violente depuis plus de vingt ans. Le régime de Pékin cherche à faire disparaître son particularisme à coups de trique. Il s’emploie, comme il l’a fait au Tibet, à diluer la population autochtone dans un afflux de colons de l’ethnie Han, majoritaire en Chine, une migration censée assurer le loyalisme des régions frontalières. Et dans ce cas, Pékin assure sa mainmise sur les ressources du Xinjiang, premier producteur de pétrole du pays et point de passage obligé vers l’ouest d’une nouvelle route de la soie dont le régime attend beaucoup.

Selon des organisations de défense des droits de l’Homme, sur plus de quinze millions de Ouïgours vivant en Chine, trois millions seraient passés par des camps de rééducation et un million y seraient encore. Plusieurs autres millions auraient été déportés ailleurs en Chine, où on les astreint à travailler dans des bagnes industriels, qui produisent d’ailleurs souvent pour de grandes firmes occidentales.

Au Xinjiang, on arrête massivement les opposants ; on exécute, pour terrorisme, de prétendus partisans de l’indépendance de la région ; on pratique des stérilisations forcées ; on chasse des paysans de leurs terres et on les remplace par des colons Han…

Le régime chinois martyrise collectivement les Ouïgours. Mais pas seulement parce qu’ils seraient de religion musulmane, car tous ne le sont pas. Sinon, pourquoi aurait-il infligé un sort analogue aux Tibétains, qui eux sont bouddhistes ? Opprimer des minorités nationales, religieuses ou autres, n’a rien de spécifique à la Chine. Bien souvent, l’État dans une société de classe exige que l’on se soumette à l’ordre de la classe ou de l’ethnie dominante. Et l’État use souvent de l’oppression de ses minorités pour diviser les classes exploitées en les intoxiquant de poison « national ».

Quant aux pays dits démocratiques, dont des dirigeants ont cru bon de s’indigner des méfaits de Pékin, leur posture hypocrite fait partie du climat de guerre économique entre l’Occident et la Chine. Le passé colonial et le présent impérialiste des États-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne parlent pour eux : ce sont des professionnels de l’oppression des minorités ou des tactiques consistant à diviser pour régner.

De plus, les groupes financiers et commerciaux des pays dits démocratiques sont les grands bénéficiaires des conditions effroyables dans lesquelles doivent trimer des centaines de millions de Chinois, qu’ils soient Ouïgours ou d’une des 55 autres nationalités que compte officiellement le pays, les Han, majoritaires, n’étant pas logés à meilleure enseigne quand ils sont ouvriers.

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