œuvres d’art africaines : restitution a minima07/10/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/10/2723.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

œuvres d’art africaines : restitution a minima

En 2017 à Ouagadougou, Macron, champion des phrases dans un sens puis dans l’autre qui ne l’engagent en rien, avait fait un discours sur la restitution des objets d’arts africains volés lors de la colonisation. Trois ans plus tard, un projet de loi est discuté à l’Assemblée pour rendre définitivement 26 objets au Bénin et un sabre royal au Sénégal. On est loin du compte.

Durant toute la période des conquêtes et de la colonisation, les militaires, les scientifiques, les administrateurs et tous les autres coloniaux ont allègrement pris et remporté dans leurs bagages des bijoux, des sculptures, des armes qui leur plaisaient ou qui allaient flatter leur position de conquérants. Un rapport de 2017 estime que 88 000 objets d’art africains se trouveraient dans les musées européens, contre quelques milliers seulement dans ceux d’Afrique.

Au début du 20e siècle, l’art africain, qui plaisait à l’intelligentsia européenne, fut baptisé « art primitif », ce qui correspondait à l’idée répandue dans les puissances coloniales que les peuples colonisés étaient bien arriérés. Le musée du quai Branly à Paris, voulu par Chirac, est rempli de ces œuvres venant des anciennes colonies, en particulier africaines. Le seul changement consiste à ne plus parler « d’art primitif », mais « d’arts premiers ».

Aujourd’hui, certains jugent les États africains incapables de conserver soigneusement les œuvres d’art, d’autres estiment que celles-ci n’ont pas été pillées mais légitimement acquises et d’autres voient dans leur retour une victoire du prétendu communautarisme. Ce projet de loi, même limité à une infime partie des œuvres en question, fait ainsi remonter à la surface des relents colonialistes. En parallèle, la justice française n’hésite pas à passer en procès les militants pan­africains qui récupèrent ostensiblement dans les musées des objets d’art, pour dénoncer justement cet état de fait.

Même si le gouvernement français finissait par restituer une bonne partie des œuvres subtilisées – ce qui serait justifié, mais peu probable – cela ne mettrait pas fin à la situation intolérable créée par un siècle de domination coloniale puis impérialiste. L’histoire des pays africains est marquée par cette domination et ce pillage culturel. Les musées comme le Louvre et le British Museum sont remplis d’œuvres volées aussi en Égypte, en Grèce ou au Moyen-Orient.

Leur restitution serait légitime. Mais le seul moyen d’effacer vraiment cette emprise coloniale sera d’en finir avec un système qui maintient l’oppression des anciennes colonies et la domination des puissances européennes. C’est sur cette base que pourra naître une nouvelle culture, basée sur des échanges entre peuples égaux.

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