Macron, la Libye et la Turquie : les assassins posent aux offensés24/06/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/06/2708.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Macron, la Libye et la Turquie : les assassins posent aux offensés

Lundi 22 juin, Macron a accusé la Turquie de « jouer un jeu dangereux » en Libye et a exigé que « cessent les ingérences étrangères et les actes unilatéraux » dans ce pays.

Quelles que soient les intentions du président turc Erdogan quant à la Libye, et elles sont tout sauf désintéressées, le président de la République française est très mal placé pour les condamner. Sans remonter au temps des colonies, l’histoire récente des relations franco-libyennes est en effet une suite d’exactions impérialistes.

Passé la période des amours tarifées avec Kadhafi, la France de Sarkozy a poussé à l’intervention militaire occidentale en Libye en 2011. Après avoir fait la démonstration in situ de la puissance de ses armes en bombardant les populations, l’armée française a renversé le dictateur, l’a fait exécuter avant qu’il n’ait eu le temps de parler et a laissé le pays en proie à la guerre civile. Puis les diplomates et militaires français ont choisi l’un des camps en présence, celui du maréchal Haftar, qui promettait les meilleurs contrats à Total. La France, sous Hollande puis sous Macron, a armé, financé, conseillé Haftar, une « ingérence étrangère » habituelle aux puissances impérialistes qui veulent installer leurs créatures au pouvoir.

Si aujourd’hui le soutien s’est fait plus discret, c’est parce que la diplomatie française a passé le relais à une coalition allant de l’Arabie saoudite aux Émirats et à l’Égypte, qui évoque d’ailleurs une intervention armée pour soutenir son protégé en difficulté.

La marine française, sous couvert de mission internationale ou de son propre chef, n’en continue pas moins de patrouiller en permanence dans les eaux libyennes, d’arraisonner les navires de commerce, de les fouiller éventuellement. C’est d’ailleurs l’intervention d’un bâtiment de guerre turc au cours d’un tel contrôle, le 10 juin, qui a suscité les déclarations de Macron.

Les uns après les autres, les présidents français ont affirmé défendre « nos valeurs » en Libye. Tout le monde peut comprendre qu’il s’agit de leurs intérêts pétroliers, de leurs positions stratégiques, militaires et commerciales. Le peuple libyen le paye d’une catastrophe dont il ne voit pas la fin. Alors, vraiment, Macron n’a rien qui lui permette de jouer les indignés face à Erdogan.

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