Ikea : le retour des “truands du patronat”10/06/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/06/2706.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Ikea : le retour des “truands du patronat”

Après huit ans d’enquête, le parquet de Versailles a décidé de renvoyer Ikea France, dix anciens dirigeants, quatre policiers et un détective privé devant le tribunal correctionnel pour « avoir mis en place un système d’espionnage organisé » contre des salariés et des clients.

Ainsi, un employé modèle serait devenu revendicatif du jour au lendemain. Jean-Pierre Paris, directeur de la sécurité d’Ikea France, cherche à savoir « quelle est la source externe à l’origine de ce changement de comportement et de ces revendications en sommeil pendant presque un an. Son discours est antimondialiste, ses méthodes "vieille garde CGT". Syndicalisme ? Prosélytisme divers ? Attac ou autres ? » Une salariée étant revenue d’un arrêt maladie « un peu trop bronzée », le même directeur se procure la copie de son passeport pour vérifier si elle n’est pas partie en vacances ! Pour la seule période 2009-2012, une juge d’instruction a démontré que ces méthodes ont été utilisées dans nombre des 34 magasins de l’Hexagone.

Pour se procurer ces informations, les dirigeants d’Ikea avaient recours à diverses méthodes : des « implants », c’est-à-dire des salariés embauchés uniquement pour moucharder ; une officine de « renseignements économiques », autrement dit une agence de détectives privés. Ils profitaient de la complicité de policiers qui leur fournissaient, moyennant finance ou par amitié, les informations d’un fichier central de la police supposé confidentiel.

Les patrons d’Ikea, peu subtils, se sont fait prendre la main dans le sac, mais le flicage des travailleurs et des militants ouvriers n’est ni une nouveauté ni une spécificité d’Ikea, groupe suédois, ou d’Amazon, groupe américain, comme les médias le laissent trop facilement entendre. En France, les patrons de l’industrie automobile ont été des précurseurs dans le recours aux « truands du patronat ». Fichage, menaces, tabassage, infiltration, recrutement de gangsters, d’anciens militaires, d’anciens de l’OAS recyclés après l’indépendance de l’Algérie, furent les méthodes systématiques utilisées chez Citroën, Berliet, Peugeot, Simca jusque dans les années 1970.

Les patrons, surtout les plus gros, bénéficient d’amitiés et de réseaux au sein de la police, des divers ministères, autant d’institutions conçues avant tout pour défendre l’ordre social et ses lois qui organisent l’exploitation des travailleurs.

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