Grèce : répression accrue contre les migrants27/05/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/05/2704.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grèce : répression accrue contre les migrants

Sur le thème « encore une menace d’Ankara », une partie de la presse grecque relaye les propos du ministre turc des Affaires étrangères qui prévoit, avec le déclin de la pandémie, une nouvelle vague d’immigration en Europe. Voilà qui va apporter de l’eau au moulin du gouvernement Mitsotakis même s’il n’a pas attendu cette énième déclaration pour stigmatiser la politique turque et pour agir contre les migrants.

Entre la nouvelle loi récemment votée et les exactions policières contre les réfugiés, les actions n’ont pas cessé, qu’elles soient couvertes légalement ou pratiquées en toute illégalité.

Du côté de la légalité, la loi du 8 mai officialise et renforce les procédures d’exception : un seul juge pourra examiner le recours en appel des déboutés du droit d’asile dans un nombre de cas plus important qu’auparavant. La détention en centre fermé sera automatique comme pour les condamnés à l’expulsion. C’en est fini de la demande de protection pour motif humanitaire. Le côté quasi militaire de cette justice appliquée aux migrants est de plus en plus visible. D’ailleurs, pour régler ces problèmes, la loi prévoit des crédits secrets utilisés « à des fins nationales confidentielles (…) pour la protection de la sécurité nationale ».

Les exactions policières et militaires s’intensifient aussi. Début mars les milliers de réfugiés envoyés par le gouvernement turc vers la frontière nord de la Grèce, sur le fleuve Evros, ont eu droit aux grenades lacrymogènes et aux matraques des policiers des deux pays. Certains Grecs armés de fusils de chasse et de leurs convictions ultranationalistes n’ont pas hésité à faire le coup de feu contre les migrants. Moins visibles car dissimulées par les autorités, près de 200 expulsions secrètes ont été dévoilées récemment par un groupe d’ONG, Border Violence Monitoring Network. La police grecque a littéralement enlevé ces réfugiés, même dans des camps éloignés de la frontière, leur a volé leurs papiers et le peu qu’ils possédaient, les a frappés, parfois torturés avant de les jeter hors du pays.

Dans les îles, une autre ONG norvégienne, Aegean Board Report, a récemment révélé qu’une quarantaine de migrants, arrivés à Samos le 28 avril, ont disparu après avoir été emmenés par la police portuaire. Officiellement, il n’y a eu aucune arrivée sur l’île ce jour-là. Ils auraient été renvoyés vers la Turquie sur des embarcations de fortune sans que les autorités turques fassent état de leur retour. Des vidéos montrent les bateaux des gardes-côtes grecs faisant un rodéo autour des bateaux chargés de migrants pour les effrayer et leur faire rebrousser chemin, au risque de les faire chavirer. Gardes-côtes grecs et turcs se les renvoient mutuellement y compris après qu’ils ont déjà accosté. S’ajoutant aux reconduites légales, 169 migrants auraient été ainsi illégalement renvoyés de Grèce, depuis fin mars, selon l’ONG norvégienne.

La Grèce compte plus de 70 000 réfugiés, dont près de 40 000 vivent dans les îles, dans des camps où le manque d’eau, d’hygiène et la surpopulation sont catastrophiques. Parmi les plus vulnérables, âgés ou malades, 2 000 ont été transférés provisoirement dans des hôtels sur le continent. Pendant que les organisations humanitaires font ce qu’elles peuvent, le gouvernement Mitsotakis, lui, a choisi la manière forte et expéditive, dans la ligne de sa politique très à droite et nationaliste. Mais que dire des gouvernements européens qui n’accueillent même pas les quelques dizaines de réfugiés mineurs qu’ils ont promis de prendre en charge ? Ils sont responsables de cette politique criminelle qui pèse sur les réfugiés et sur la population du pays. Et comme tous les commanditaires, ils s’en lavent les mains.

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