La société en crise

Les décès du Covid-19 : brouillard statistique

En pleine épidémie meurtrière, le nombre réel de décès à l’hôpital, en Ehpad, mais aussi à domicile, dus au coronavirus n’est connu qu’approximativement, et avec retard.

Ce nombre est-il de l’ordre de 25 000, comme le signale le directeur général de la Santé qui ignore les morts à domicile ? Ou bien de 35 000 à 38 000 comme le craignent plusieurs spécialistes ? Cet indicateur fondamental manque. Et ce n’est qu’avec des mois ou peut-être plus d’une année de retard qu’il sera disponible.

En effet, le Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc), service spécialisé de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), ne peut pas faire plus vite en partie parce que dans 80 % des cas les 600 000 certificats de décès qui lui remontent chaque année, et dont il doit vérifier et coder la partie médicale, ne sont toujours pas informatisés.

Cette faiblesse du système français de collecte et d’exploitation des causes médicales de décès avait déjà été mise en cause il y a dix-sept ans, lors de la meurtrière canicule de l’été 2003, dont le nombre de victimes avait été d’abord chiffré par les autorités à 11 500, puis à 14 800, et enfin réévalué à 19 500 quatre années plus tard.

Depuis, les autorités n’ont fait, à coups de suppression d’emplois de fonctionnaires, qu’épaissir le brouillard qui règne sur les statistiques de décès. En effet, les codeurs du CépiDc qui étaient douze en 2012, ne sont plus que quatre actuellement et il ne devrait en rester qu’un seul en 2021 pour cause de départs à la retraite non remplacés. Un très mauvais calcul pour la santé publique.

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