Liban : la population face au diktat des banques11/03/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/03/2693.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Liban : la population face au diktat des banques

Samedi 7 mars, le Premier ministre du Liban Hassan Diab a annoncé la suspension du paiement de sa dette envers les banques. Il a ainsi ouvert la voie à des négociations avec les bailleurs et le FMI pour une restructuration de la dette du pays, devenue une des plus élevées dans le monde, avec 170 % du PIB.

Cette décision survient après plusieurs mois de dégradation de la situation financière et économique aux dépens de la population.

La dette, accumulée depuis la fin de la guerre civile de 1975-1990, avait permis en premier lieu d’enrichir les organismes prêteurs grâce à des taux d’intérêt allant jusqu’à 6 voire 7 %. L’argent avait aussi fini dans les poches de la clique politique corrompue qui gouverne le pays depuis trente ans. Grâce à des montages financiers mis en place avec le consentement des banques et aussi des organismes financiers internationaux, le Liban avait réussi à continuer à attirer les capitaux, malgré la constante progression du niveau de sa dette.

Mais, avec l’approfondissement de la crise économique mondiale, les capitaux en dollars ont cessé progressivement d’affluer, au point de faire planer depuis quelques mois le risque de manque de liquidités. En octobre 2019, le Premier ministre d’alors Hariri avait annoncé, avec l’accord affiché ou tacite des autres groupes politiques du gouvernement, la mise en place d’une série de nouvelles taxes touchant la population. Ces annonces avaient déclenché une vague de protestation sans précédent dans le pays, conduisant à la démission du gouvernement Hariri.

La formation du nouveau gouvernement présidé par Diab n’a pas fait taire les protestations, d’autant plus que les banques ont mis en place une politique de rétention des dollars limitant les retraits d’argent des petits épargnants. En même temps, continuait la fuite vers l’étranger des capitaux détenus par les plus riches et par les politiciens, atteignant selon certaines sources plus de 2 milliards de dollars depuis septembre 2019. Pendant ce temps, les travailleurs devaient payer la note, par le biais de l’inflation découlant de la dévaluation de la livre libanaise ainsi que des baisses de salaire et des licenciements.

Les manifestants ont continué à réclamer la récupération de l’argent volé, et en parallèle de voir « ­dégager » toute la clique politique corrompue.

L’annonce de Diab signifie que les montages financiers ne suffiront plus à honorer les échéances de la dette, et qu’il se dit prêt à mettre en place la politique d’austérité voulue par le FMI et les États européens. Il n’est pas dit que la population, dont une partie continue à manifester et à protester depuis des mois devant les banques, accepte de payer. La revendication de récupérer l’argent volé et de faire payer ceux qui se sont enrichis sur son dos devient un impératif de survie.

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