Dans le monde

Syrie : les conséquences criminelles de la politique impérialiste

L’offensive de l’armée syrienne, appuyée par l’aviation et la logistique russes, sur la région d’Idlib se poursuit. La presse relate des bombardements incessants, des villages désertés, des villes effondrées, un million de personnes, sur les trois qui peuplent cette région, errant dans le froid et la peur.

Pour reprendre le contrôle de la zone contre les quelques milliers de rebelles en armes qui y subsistent encore, le régime de Bachar el-Assad est en passe de la raser. La fuite vers la Turquie frontalière est impossible : l’armée turque, dont quelques détachements contrôlaient plus ou moins cette partie de la Syrie en liaison avec des rebelles, a fermé hermétiquement la frontière.

Le président turc Erdogan est maintenant contraint de lâcher un peu du terrain pris autour d’Idlib. Mais, après avoir réduit la poche d’Idlib, Bachar el-Assad voudra affermir aussi son contrôle sur les zones sous contrôle kurde, ce qui ne déplaira pas à Erdogan.

La presse européenne ne ménage pas les qualificatifs et les articles désolés sur l’impuissance occidentale quant à ce nouveau massacre perpétré en direct. Le ministre français des Affaires étrangères a évoqué le 15 février avec son collègue turc la situation humanitaire dramatique de la province d’Idlib. À l’occasion de leur réunion à Munich le 21 février, les chefs d’État européens ont appelé au cessez-le-feu et à la constitution d’un corridor humanitaire. Enfin, une conférence réunissant les diplomates français, allemands, turcs et russes est programmée pour le 5 mars.

Toutes ces simagrées n’auront certainement aucune conséquence pour la population d’Idlib, prise en tenaille entre les troupes djihadistes et celles du régime. Et l’opinion européenne, à qui elles sont destinées, aurait tort de croire qu’il pourrait en sortir quelque chose de positif. Il n’y a rien à espérer des puissances impérialistes, dont ce sont précisément les actions qui ont déclenché le processus conduisant au massacre actuel.

L’ensemble de la région est, depuis un siècle maintenant et pour des raisons essentiellement pétrolières, sous la dépendance des puissances européennes concurrentes et complices. Elles y font régner leur ordre par l’intermédiaire de régimes dictatoriaux, comme celui de la famille Assad en Syrie. Lorsque ces régimes expriment des velléités d’indépendance, les services secrets ou les armées occidentales exercent leurs pressions qui parfois vont jusqu’à la guerre.

C’est ce qui s’est passé avec l’irakien Saddam Hussein, au prix de deux guerres menées par les États-Unis et d’une occupation catastrophique. Quant au régime de Bachar el-Assad, la France, ex-puissance mandataire du bloc Syrie-Liban, a voulu profiter des révoltes de 2011 dans les pays arabes pour tenter de le remplacer par un régime plus docile. Avec les États-Unis, elle a donc soutenu, financé et armé les groupes rebelles syriens, y compris les plus réactionnaires. L’Arabie saoudite, les Émirats et la Turquie ont fait de même, avec une prédilection pour les plus intégristes d’entre les combattants, avec la collaboration des services secrets occidentaux. Mais la créature djihadiste a échappé à ses créateurs, et Daesh a déstabilisé toute la région, allant même, crime suprême, jusqu’à prendre certaines zones pétrolières. Les dirigeants occidentaux ont alors fait feu de tout bois pour les reprendre, quitte à s’appuyer sur les milices kurdes pour les abandonner plus tard.

Après des opérations militaires ayant causé des centaines de milliers de morts, après avoir détruit l’Irak, une bonne partie de la Syrie et déplacé des millions de civils, les grandes puissances, dont la France, regardent le régime syrien reprendre le contrôle de la région d’Idlib au prix du massacre d’une population qu’elles ont elles-mêmes poussée dans une situation sans issue. Cela ne les empêchera sûrement pas, si elles le peuvent, de se livrer à de nouvelles manœuvres.

Qui jugera un jour cette politique criminelle des dirigeants impérialistes ?

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